La lecture de fiction est une suspension volontaire d’incrédulité, dit la belle formule de Samuel Coleridge. Mais cette incrédulité, au fil des siècles, a tant gonflé qu’elle est devenue impossible à suspendre. La photographie, me semble-t-il, est le procédé qui nous redonnera notre crédulité originelle de lecteur, préalable à l’immersion totale dans le récit.
De même que l’on ne trouve à redire que des mauvais livres (où l’on se fait une joie de prendre en note les incorrections, celles qui suscitent notre mauvaise ironie) tandis que les excellents sont si dépourvus de faille qu’on ne peut y introduire aucun pied-de-biche pour découvrir leurs rouages, de même l’amour commence pour moi à décliner lorsqu’on est capable de dire
exactement ce qui nous plaît chez l’autre. Dès lors, l’autre est seulement une liste avec des cases cochées.
Rien ne donne comme une grue le sentiment d'urbanité, quelle que soit l'émotion que l'on attache à ce sentiment; et, de la même manière que tout mécanique qu'il soit le tracteur symbolise la campagne, a intégré notre représentation de la campagne comme les éoliennes ne manqueront pas de le faire un jour, de même il me suffisait, me semblait-il, d'avoir l'esprit moderne — c'est-à-dire
de trouver une voiture de course plus belle que la victoire de Samothrace — pour succomber au charme des ciels balayés par l'essuie-glace d'une grue.
Le terroriste moderne est le lointain descendant du combattant irrégulier des guerres de partisans. La différence est qu’il vise désormais des cibles indistinctes et qu’il agit à l’échelle mondiale, ce qui veut dire qu’il s’est « déterritorialisé ». Le terrorisme global est à l’image de notre temps : trasnational, fluide, organisé en réseaux. […] Les victimes des bombes
ne sont jamais la cible principale du terrorisme. Celui-ci vise avant tout les gouvernements et les opinions publiques. Les victimes immédiates ne sont pas des fins en soi, mais des moyens pour faire pression et frapper les esprits. Les médias, contraints de faire leurs gros titres sur l’événement, en sont le relais principal et, objectivement, les auxiliaires majeurs. […] En outre, même
s’il existe un lien entre eux, ce serait une grave erreur de confondre l’islam avec l’islamisme et l’islamisme avec le terrorisme. Il importe surtout de comprendre que, si les terroristes commettent des actes criminels, ce ne sont ni des « fous », ni des « criminels de droit commun », ni même des « fanatiques » dénués de toute rationalité. Leurs actes sont d’abord des actes
politiques. Ils sont la conséquence de situations politiques concrètes.
Le cinéma en tant que rêve, le cinéma en tant que musique. Aucun art ne traverse, comme le cinéma, directement notre conscience diurne pour toucher à nos sentiments, au fond de la chambre crépusculaire de notre âme.
Toute notre civilisation est aphrodisiaque
Notre liberté même, nous ne la créons pas. Nous sommes fatalement libres, c'est-à-dire d'une manière nécessaire (dans sentiment et raison pure); C'est une propriété de notre organisme dont nous nous servons. Mais nous ne sommes pas libre d'empécher notre libre arbitre d'agir, pas plus que nous ne pouvons empêcher toute autre fonction du corps de s'accomplir suivant ses lois. Nous ne
sommes pas libres de ne pas être libres.