Que les gens d'esprit sont bêtes.
Nos vers coulent d’une veine facile, et la foule nous lit, la Cour nous lit, assidûment. Nous écrivons pour les gens sans culture et, tout aussi bien, pour les gens de culture.
DSK, NKM, BHL, FOG… Jamais je ne ferai partie de ce club très fermé des gens désignés par leurs initiales.
Ceux qui affirment que rien n’est plus démocratique que l’audimat se moquent du monde, bien entendu. L’audimat ne permet pas de mesurer ce que les gens veulent, mais de savoir jusqu’à quel point ils ont intériorisé ce qu’on les a habitués à vouloir — ce qui n’est pas tout à fait la même chose. Les gens aiment ce qu’on leur fait aimer. Dans ce domaine comme ailleurs, c’est
l’offre qui détermine la demande, et non l’inverse.
Le pays peut-il sombrer dans la guerre civile? Beaucoup de gens avancent cette hypothèse, mais je n’en crois rien. Dans un avenir prévisible, on peut s’attendre à des colères, à des troubles, à des émeutes, à des violences de toute nature, mais la guerre civile reste à mes yeux un fantasme. Je remarque d’ailleurs que ceux qui mettent le plus en garde contre cette perspective sont
aussi, en général, ceux qui souhaitent le plus la voir se réaliser. Sans doute parce qu’ils s’imaginent être en mesure de gagner la guerre en question, ce qui ne fait qu’ajouter à leur naïveté.
Cette trop grande confiance dans les théories, qui cause tout le mal, vient souvent d'une mauvaise éducation scientifique, dont le savant doit ensuite se corriger. Mieux vaudrait souvent qu'il fût ignorant. Il n'a plus l'esprit libre; il est enchaîné par des théories qu'il regarde comme vraies absolument. Un des plus grands écueils que rencontre l'expérimentateur, c'est donc d'accorder
trop de confiance aux théories. Ce sont les gens que J'appellerai des systématiques.
L'enseignement contribue beaucoup à produire ce résultat. Il arrive généralement que dans les livres et dans les cours on rend la science plus claire qu'elle n'est en réalité. C'est même là le mérite d'un enseignement de faculté de présenter la science avec un ensemble systématique dans lequel
on dissimule les lacunes pour ne pas rebuter les commençants dans la science. Or, les élèves prennent le goût des systèmes qui sont plus clairs et plus simples pour l'esprit, parce qu'on a simplifié sa science et élagué tout ce qui était obscur, et ils emportent de là l'idée fausse que les théories de la science sont définitives et qu'elles représentent des principes absolus dont
tous les faits se déduisent. C'est en effet ainsi qu'on les présente systématiquement.
Une vingtaine de jeunes gens, choisis parmi les plus habiles des universités danoises, étaient employés aux observations et aux calculs. Véritables apprentis astronomes, ils s’instruisaient en voyant travailler leur maître; guidée par l’esprit ardent et communicatif de son chef, la petite colonie sembla bientôt ne former qu’une seule famille; sans inquiétude comme sans ambition, ces
jeunes gens d’élite, unis par le même lien qui les attachait à la science, préoccupés des mêmes problèmes et attentifs aux mêmes phénomènes, s’animaient les uns les autres en se prêtant une mutuelle et cordiale assistance.
Tout semblait autour d’eux conspirer au même dessein et les inviter au travail; respirant pour ainsi dire l’amour de l’astronomie, ils
s’empressaient d’apporter au trésor commun leur butin de chaque jour, heureux de penser qu’il devait vivre à jamais, et sans se soucier d’y attacher leur nom.
Les gens anthropomorphisent toujours les objets dont ils se servent.