L'avis que tu nous donnes sur la partie qu'on peut en tirer des femmes est sensé et judicieux; nous en profiterons. Nous connaissons toutes l'influences que peut avoir ce sexe intéressant qui ne supporte pas plus indifféremment que nous le joug de la tyrannie; et qui n'est doué d'un moindre courage, lorsqu'il s'agit de concourir à le briser.
L'individu n'est pas la somme de ses impressions générales, il est la somme de ses impressions singulières.
Nietzsche a instruit patiemment sa volonté de puissance par ses longues marches dans la montagne, par sa vie en plein vent sur les sommets. Sur les sommets, il a aimé : « L'âpre divinité de la roche sauvage ». La pensée dans le vent; il a fait de la marche un combat. Mieux, la marche est son combat. C'est elle qui donne le rythme énergétique de Zarathoustra. Zarathoustra ne parle pas
assis, il ne parle pas en se promenant, comme un péripatéticien. Il donne sa doctrine en marchant énergiquement. Il la jette aux quatre vents du ciel.
Il n'y a pas de poésie antécédente à l'acte du verbe poétique. Il n'y a pas de réalité antécédente à l'image littéraire. L'image littéraire ne vient pas habiller une image nue, ne vient pas donner la parole à une image muette. L'imagination, en nous, parle, nos rêves parlent, nos pensées parlent. Toute activité humaine désire parler. Quand cette parole prend conscience de soi,
alors l'activité humaine désire écrire, c'est-à-dire agencer les rêves et les pensées. L'imagination s'enchante de l'image littéraire. La littérature n'est donc le succédané d'aucune autre activité. Elle achève un désir humain. Elle représente une émergence de l'imagination.
Devant l'eau profonde, tu choisis ta vision; tu peux voir à ton gré le fond immobile ou le courant, la rive ou l'infini; tu as le droit ambigu de voir et de ne pas voir; tu as le droit de vivre avec le batelier ou de vivre avec « une race nouvelle de fées laborieuses, douées d'un goût parfait, magnifiques et minutieuses ». La fée des eaux, gardienne du mirage, tient tous les oiseaux du
ciel dans sa main. Une flaque contient un univers. Un instant de rêve contient une âme entière.
La marche contre le vent, la marche dans la montagne est sans doute l'exercice qui aide le mieux à vaincre le complexe d'infériorité. Réciproquement, cette marche qui ne désire pas de but, cette marche pure comme une poésie pure, donne de constantes et d'immédiates impressions de volonté de puissance.