Alain de Benoist
Alain de Benoist

Le terroriste moderne est le lointain descendant du combattant irrégulier des guerres de partisans. La différence est qu’il vise désormais des cibles indistinctes et qu’il agit à l’échelle mondiale, ce qui veut dire qu’il s’est « déterritorialisé ». Le terrorisme global est à l’image de notre temps : trasnational, fluide, organisé en réseaux. […] Les victimes des bombes

ne sont jamais la cible principale du terrorisme. Celui-ci vise avant tout les gouvernements et les opinions publiques. Les victimes immédiates ne sont pas des fins en soi, mais des moyens pour faire pression et frapper les esprits. Les médias, contraints de faire leurs gros titres sur l’événement, en sont le relais principal et, objectivement, les auxiliaires majeurs. […] En outre, même

s’il existe un lien entre eux, ce serait une grave erreur de confondre l’islam avec l’islamisme et l’islamisme avec le terrorisme. Il importe surtout de comprendre que, si les terroristes commettent des actes criminels, ce ne sont ni des « fous », ni des « criminels de droit commun », ni même des « fanatiques » dénués de toute rationalité. Leurs actes sont d’abord des actes

politiques. Ils sont la conséquence de situations politiques concrètes.

Julia Kristeva
Julia Kristeva

Il ne suffit pas de bombarder Daech,
d’incarcérer les djihadistes
ou de promettre,
voire de trouver, du
travail aux jeunes chômeurs
des quartiers
La guerre contre le mal radical nous demande de prendre au sérieux le projet de Nietzsche, « poser un grand point d’interrogation à l’endroit du plus grand sérieux », entendons : à l’endroit de Dieu,

des idéaux, et de leur absence. Pour les faire connaître, les transmettre aux jeunes générations et les réévaluer, les problématiser, les repenser sans fin, les réinventer. Interpréter l’horreur et lutter concrètement contre elle par tous les moyens. Ne pas démissionner devant le mal, ni même devant le mal extrême. Mais poursuivre patiemment la recherche, certainement pas d’on ne

sait quel équilibre utopique et sécuritaire, mais de ce point fragile que Pascal définit comme un « mouvement perpétuel », en écrivant : « Qui a trouvé le secret de se réjouir du bien sans se fâcher du mal contraire aurait trouvé le point. C’est le mouvement perpétuel. » Et si la vision qui nous manque aujourd’hui était précisément ce « point », ce « mouvement perpétuel

», vers le « secret de se réjouir du bien sans se fâcher du mal ». Une certaine expérience intérieure très exigeante que les barbares ont désertée…

Il ne suffit pas de bombarder Daech, d’incarcérer les djihadistes ou de promettre, voire de trouver, du travail aux jeunes chômeurs des quartiers. Il est urgent d’organiser, avec les parents, dès le plus jeune âge, un

suivi attentif aux failles chez les éventuelles proies des fous de Dieu, qui se tapissent, souvent inaperçues, dans les marges sociales ou dans les pathologies latentes. Il est plus qu’urgent aussi de forger et de partager de nouveaux idéaux civiques attractifs pour une jeunesse vécue comme une ressource, et non plus comme un danger. Ses qualités de générosité, de créativité et

d’engagement pourraient se déployer dans des métiers à vocation sociale, éducative, culturelle, humanitaire ; des ONG, des institutions de coopération, d’entraide, etc. Reconstruire l’Afrique est de ces chantiers qui peuvent passionner les jeunes Européens, mais aussi l’éducation des jeunes filles, le développement des énergies durables… Qui pourrait éveiller, guider, faire

aboutir ces désirs ?

Faisons une priorité de la formation, assortie d’une valorisation conséquente, d’un « corps enseignant et formateur » ; ce dispositif serait voué à l’accompagnement personnalisé du mal-être psychosexuel, du besoin de croire et du désir de savoir des adolescents. Les éducateurs, enseignants, professeurs, auxiliaires de vies, psychologues, mais aussi

managers en ressources humaines, entrepreneurs… pourraient créer une véritable passerelle au-dessus de l’abîme qui se creuse et de l’état de guerre qui menace. C’est cela, la priorité mondiale de notre globalisation hyperconnectée. La seule qui pourrait protéger –à travers la diversité culturelle devenue partageable– l’humanité elle-même. + Lire la suiteCommenter

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Maurice Merleau-Ponty
Maurice Merleau-Ponty

Le mot d’image est mal famé parce qu’on a cru étourdiment qu’un dessin était un décalque, une copie, une seconde chose, et l’image mentale un dessin de ce genre dans notre bric-à-brac privé. Mais si en effet elle n’est rien de pareil, le dessin et le tableau n’appartiennent pas plus qu’elle à l’en soi. Ils sont le dedans du dehors et le de- hors du dedans, que rend possible

la duplicité du sentir, et sans lesquels on ne comprendra jamais la quasi-présence et la visibilité imminente qui font tout le problème de l’imaginaire. Le tableau, la mimique du comédien ne sont pas des auxiliaires que j’emprunterais au monde vrai pour viser à travers eux des choses prosaïques en leur absence. L’imaginaire est beaucoup plus près et beaucoup plus loin de l’actuel

: plus près puisqu’il est le diagramme de sa vie dans mon corps, sa pulpe ou son envers charnel pour la première fois ex- posés aux regards, et qu’en ce sens-là, comme le dit énergiquement Giacometti : « Ce qui m’intéresse dans toutes les peintures, c’est la ressemblance, c’est-à-dire ce qui pour moi est la ressemblance : ce qui me fait découvrir un peu le monde extérieur. »

Beaucoup plus loin, puisque le tableau n’est un analogue que selon le corps, qu’il n’offre pas à l’esprit une occasion de repenser les rapports constitutifs des choses, mais au regard pour qu’il les épouse, les traces de la vision du dedans, à la vision ce qui la tapisse intérieurement, la texture imaginaire du réel. + Lire la suiteCommenter  J’apprécie     

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Hermann Rauschning
Hermann Rauschning

Toujours et partout, on trouve des particularistes qui aspirent à l'indépendance nationale, ou au pouvoir économique, ou à la domination politique. L'appétit non satisfait et l'orgueil humilié ont toujours été les auxiliaires infaillibles de l'action révolutionnaire, permettant de poignarder l'ennemi dans le dos.

Svetislav Basara
Svetislav Basara

Simplement, l'alcool m'avait si bien dégraissé le cerveau et les nerfs, les avait si bien nettoyé des résidus de calmants et d'hallucinogènes, que pour un moment j'ai vu le monde tel qu'il est en réalité, c'est-à-dire tel qu'il était avant que des cartographes, des bibliothécaires et leurs auxiliaires ne l'aient transformé en un lieu de détresse, en un bourbier dont la destination est

de rendre les hommes irritables, affligés et méchants.

Jean-Edern Hallier
Jean-Edern Hallier

Aujourd’hui ne subsiste plus que cette maison de papier, ce temple de mots, cimenté syntaxiquement, avec ses vastes couloirs de relatives, ses escaliers de gérondifs, de désinences basculant dans les futurs antérieurs, dérapant sur les propositions causales. Je traverse ses vastes couloirs de verbes auxiliaires ; je nuance les conditionnels et les subjonctifs ; je passe sous ses voûtes

grammaticales et sous ses arcs-boutants de conjonctifs de subordination. Cette demeure s’appelle la langue française. Ô, palais douloureux et grandiose des mille et une nuits de la pensée !