Paul Reboux
Paul Reboux

RUPTURE

Une sotte querelle ayant troublé les jours
D'ineffable harmonie où s'unissaient nos âmes,
Nous voulûmes tous deux en finir, et jurâmes
De nous oublier pour toujours.

Toutes les cruautés que la douleur inspire,
Nous les eûmes. Mais, quand vint l'heure des adieux,
Nous restâmes muets et les yeux dans les yeux,
Sans

trouver un mot à nous dire.

Nous sentions s'envoler notre ressentiment
Et fondre dans nos cœurs tout désir de vengeances,
Les bonheurs de jadis aux tristes souvenances
Nous attendrissaient doucement.

Comprenant la douleur des âmes déliées,
De nos lèvres fuyaient les souvenirs moqueurs,
Et nous sentions monter des larmes qu'en nos

cœurs
Notre joie avait oubliées.

Un charme au fond de nous paraissait murmurer
Que nos amours étaient bien loin d'être finies...
Et lorsque pour l'adieu nos mains se sont unies,
Elles n'ont pu se séparer.

Les Matinales

Paul Reboux
Paul Reboux

Il m'apparait, au contraire, que le propre des génies est d'etre de tous les pays et de tous les temps.
Si Hugo ne répondait pas au besoin d'ampleur et d'enthousiasme commun à tous les hommes, serait-il si grand ?
Shakespeare inspirerait-il une dévotion si généralisée s'il n'avait pas exprimé des sentiments éternels ?
Beethoven est admiré partout ...

Paul Reboux
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- Tiens ! ce vieux Jardin des Plantes ! Si je le traversais pour y retrouver quelques souvenirs de jeunesse ? se dit Réal, que ses occupations avaient mené jusqu-là.
Mais dès qu'il fut entré dans ce premier établissement zoologique de France, il se sentit comme transi par l'humiliation.
Oh ! ces bâtiments sordides et délabrés, ces carreaux fendus que du papier consolide, ces

fauves pelés soumis au régime cellulaire, ces singes tuberculeux tapis dans un coin de cage, ces ruminants nostalgiques broutant la boue ...

Paul Reboux
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L'homosexualité, tout comme l'hétérosexualité, comporte tous les degrés, toutes les nuances : du platonisme à la salacité, de l'abnégation au sadisme, de la santé joyeuse à la morosité, de la simple expansion à tous les raffinements du vice ...
(André Gide - "Corydon")

Paul Reboux
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La morale oscille suivant les ambitions ou les besoins des peuples.
N'étant pas absolue, elle n'est respectable que relativement ...

Paul Reboux
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Dans le style épistolaire, il faut montrer du naturel mais point de négligence ; de l'abandon, mais point de bavardage ; de la concision mais point de sécheresse ; de la courtoisie sans humilité ; de l'émotion sans grandiloquence ...

Paul Reboux
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Le Désiré était amarré à l'éperon du premier bassin, dans le port de Brest.
Trapu, robuste, bâti pour résister aux lames, ce vapeur portait à l'arrière un pavillon tricolore où se distinguait, entre deux ancres, l'étoile jaune des Ponts et Chaussées.
C'était le baliseur, affecté au service des phares pour la région qui s'étend de la pointe du Raz à l'île Vierge.

Ce jour-là, les filins enroulés en galette, le pont lavé et gratté, les cuivres étincelants, donnaient au bord un air de fête.
Mr de Croixdalle, l'ingénieur en chef, venu de Quimper, devait s'embarquer à dix heures.
Sur le quai, l'ingénieur ordinaire et Kerroz, le conducteur principal, causaient en attendant.
- Alors, monsieur Fouché, vous croyez qu'on va

entreprendre le travail ?
- C'est presque certain.
- Ah ! Nous aurons du mal !
Lucien Fouché allumait une cigarette, abritant la flamme dans ses paumes rapprochées.
- Affaire de temps, répondit-il, en jetant l'allumette par-dessus son épaule.
Il avait quitté Paris pour Brest, où le retenait son poste, et le séjour en province lui pesait.
Aussi

accueillait-il avec faveur le projet de construire un phare isolé en mer, bien qu'il mesurât les difficultés de l'entreprise...... + Lire la suiteCommenter  J’apprécie          150

Paul Reboux
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- Toi, tiens ... Je suis sûr que tu ne sais pas seulement pas par qui tu es gouverné ? ... Oh ! Je t'en prie ... Ne nomme pas le président du conseil, ni les ministres ... Je ne t'apprendrai que ce sont des pantins ... Ils lèvent les bras, tournent la tête quand les banques tirent les ficelles ...

Paul Reboux
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Notre orthographe fut inventée par les moines, transmise par les clercs, bouleversée par les pions, truffée de lettres inutiles par les savants, défigurée par les typographes ...

Paul Reboux
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Kerroz y vit une preuve de la malchance fatale qui semblait s'attacher à la Roche du Diable.
Fouché se demanda si, par une coïncidence bizarre, les gardiens continueraient à subir là-bas d'extraordinaires aventures.
Mr de Croixdalle, lui, s'indigna. Il brandit son lorgnon au dessus de sa tête en affirmant que si jamais on découvrait ces deux gaillards coupables d'abandon de

poste dans un service public, il ferait tout pour qu'ils eussent à subir le maximum de la peine....

Paul Reboux
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Le passé composé marque un fait qui a eu lieu à une époque récente.
(Grammaire de l'Académie Française, page 170).
Exemple : "Dieu a créé le monde en sept jours" ...

Paul Reboux
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Emprunter un livre, c'est le voler.
Prêter un livre, c'est le laisser voler ...

Paul Reboux
Paul Reboux

- Ouvre les grands journaux, dont nous parlions tout à l'heure.
Tu y constateras les effets d'une organisation unique, centrale, qui, à la même heure, sur toutes les affaires qui se produisent, donne exactement la même note, discrédite ou exalte les mêmes entreprises, et pousse toutes les consciences dans le même chemin ...
(Cette phrase est de Jean Jaurès.
En plusieurs

endroits, Paul Reboux a mêlé à son texte des passages dont les signatures sont parmi les plus grands écrivains français.
En dénonçant avec indignation l'audace sacrilège de certains personnages des "Drapeaux", on risquerait de traiter involontairement Fénelon, Voltaire, Renan, Hugo, Condorcet, Vogüé, Brunetière, Jules Lemaître et tant d'autres sans les ménagements qui leur sont

dus).

Paul Reboux
Paul Reboux

Le jour où l'on aura accoutumé les gens à considérer combien de héros chamarrés sont des risque-tout imbéciles, où l'on peindra la guerre sous ses véritables couleurs, ne parviendra-t-on pas à convaincre les belliqueux ?
Les foules ne frémiront plus d'un enthousiasme aussi confiant ...

Paul Reboux
Paul Reboux

Il y a des décences du langage qu'il faut savoir observer, si l'on se mêle d'écrire.
Quand on ne sait pas se tenir à table comme il faut, user d'un verre, d'une serviette, d'un couteau, on va manger à la cuisine ...

Paul Reboux
Paul Reboux

Est-il malhonnête de siffler au théâtre ?
Nos pères, sur ce point, nous ont donné de bonnes leçons.
Ils n'étaient pas, eux, des spectateurs empaillés, inertes, passifs, prêts à tout supporter, incapables de manifester un sentiment.
Cette passivité, le public actuel la considère comme de la bienséance.
Elle n'est qu'un signe de l'appauvrissement des esprits et

du dessèchement des coeurs.
Certes, il faut siffler au théâtre ...

Paul Reboux
Paul Reboux

Etre amoureux, c'est voir dans celui ou dans celle qui vous aime ce qu'on y souhaite, et non pas ce qu'on y trouve. (Le Nouveau Savoir-Ecrire)

Paul Reboux
Paul Reboux

Connaître les étymologies, c'est être admis dans les coulisses du langage ...

Paul Reboux
Paul Reboux

Que l'art d'écrire existe, cela n'est point douteux.
Qu'il puisse s'enseigner, c'est une autre affaire ...

Paul Reboux
Paul Reboux

Un homme qui appliquerait les lois de la bienséance, mais qui aurait l'esprit stupide, ne serait nullement en état de vivre parmi les honnêtes gens.
La première règle du savoir-vivre, c'est d'être capable de se passer de règles.
Ne donnez pas aux chose de l'étiquette tant d'importance.
Ne vous souciez pas du "qu'en dira-t-on".
Gardez-vous des mesquineries.
Et

surtout, n'accordez aucun crédit aux principes fondés sur "ce qui se fait" ...