Kei Miller
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Chaque âne brait sa propre mélopée, tout pareil, chaque homme a son propre talent

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She had lived with her mother and a man who, it had been explained to her, was not quite her father, but rather the gentleman with whom her mother, Norah, was ‘in conversation’. That is how such things were said in those days.
( Elle avait vécue avec sa mère et un homme, dont on lui avait dit qu'il n'était pas son père, mais plutôt un monsieur avec lequel sa mère Norah était " en

conversation ".
À l'époque ces choses étaient nommées ainsi).
( Jamaïque année 20-30)

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One of Ma Taffy’s most constant bits of advice to her girls was this: Make a fool kiss you, that is one thing, but to make a kiss fool you! That is even worser. Don’t make no man turn you into no fool! Sometimes she replaced the word ‘kiss’ with something even cruder.
( Un des fréquents conseilles que Ma Taffy donnait à ses filles était: Laissez un imbecile t’embrasser est une

chose mais te faire avoir par un baiser ! C’est pire . Ne permet à aucun homme de te duper ! Parfois elle remplaçait le mot “baiser” par un truc beaucoup plus cru).

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The strange and fastidious ways of Mr Saint-Josephs have followed him all the way from his two-bedroom country house in Trelawny to the single room he now rents in the backyard of a Mona bungalow. He continues to wake up at fifteen minutes to five each morning, then stay under the sheets until the clock actually strikes five,............
At five a.m. he will light the flame of his tilley

lamp and, by its warm light, read exactly two pages of the Bible followed by two pages of Charles Darwin’s On the Origin of Species. That the two books contradict each other is not a thought that ever occurs to him. He understands very little of either text, but he is still making his way, slowly and carefully, through both, imagining that with each sentence read he has improved himself in some

profound way.
( Les habitudes étranges et méticuleuses de M.Saint-Joseph l'ont suivi tout au long de son voyage de sa bicoque de deux chambres à Trelawny, à cette unique chambre qu'il loue maintenant dans l'arrière cours d'un bungalow du quartier de Mona. Il continue à se réveiller à cinq heures moins le quart chaque matin, attendant sous ses draps la sonnerie du réveil à cinq

heures.....À cinq heure, il allume sa lampe à kérosène, et à sa chaude lueur, lit exactement deux pages de la Bible , suivies de deux pages de "L'Origine des Espèces " de Charles Darwin. Que ces deux livres se contredisent, ne lui vient jamais à l'idée.Il comprend très peu aux deux textes,mais il continue son rituel lentement et avec application , imaginant qu'avec chaque phrase lue, il

s'est profondément amélioré.)
P.s.L'homme est prof d'école primaire à Augustown, Jamaïque, 1980 et quelques.... + Lire la suiteCommenter  J’apprécie          210

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A l’époque, il y avait à Augustown plein d’histoires différentes : celles de la Bible et celles d’Anansé l’Araignée ; celles des livres et celles des bouches-cancans ; celles lues lumière-la-bougie et celles racontées lueur-la-lune. Mais la division était toujours nette entre les histoires qui étaient écrites et celles qui étaient racontées - entre les premières qui avaient un

parfum de neige et de terre éloignées et celles qui avaient l’odeur de leur propre sueur.

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D’abord, vous devez imaginer le ciel (bleu et sans nuage, si cela peut aider), ou bien le noir irradiant de la nuit. Puis – et c’est le plus important – vous imaginer, vous, au milieu de ce ciel, flottant à mes côtés. En dessous de nous, le disque vert et bleu de la Terre.

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Comme toute marchande jamaïcaine qui se respecte, Maizy maniait le sarcasme avec dextérité. Elle se montrait tellement dévouée à son art que certains jours, elle considérait que son succès tenait plus au nombre d'insultes échangées qu'aux paires de chaussures vendues.

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J'ai jamais rien dit à aucune de la manière dont Miss Lily me prenait avec elle tous les soirs pour me faire apprendre mes leçons et comment chaque soir, je lui lisais Jane Eyre, son livre préféré, que j'étais capable de réciter de A à Z sans même regarder les pages tellement je le connaissais par coeur. J'ai jamais pris la peine de poser la grande question : A quoi ça sert de lire et

d'écrire ? Qu'est-ce que ça vaut quand tous les livres du monde peuvent rien changer au fait que certains sont nés déjà tout krasé-pliyé et qu'à chaque tentative pour se redresser, y se cognent sèlman la tête ?

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- Les Crieurs de Vérité sont toujours là, Maman. On est encore là. Voyants. Prophètes. Annonceurs de Cataclysmes. On est là. Mais les choses ont changé. On saisit un crayon coincé derrière l'oreille et on écrit. On a écrit beaucoup de livres. Et devine un peu Maman : il y a des gens qui vont dans des librairies et achètent les livres que l'on a écrits, les rangent sur leurs

étagères. La plupart du temps, ils ignorent que ce ne sont pas des romans, des poèmes, des livres d'histoire. Mais de simples avertissements. Maman, il y a tellement de gens dans ce monde qui ont des oreilles mais ne savent pas entendre. Et tellement qui ont des yeux mais ne savent pas voir.

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J'ai compris comment vie-là fonctionne. Tout ce que l'homme blanc croit fin-fond de son coeur, la chose-là, il l'appelle religion mais tout ce que femme noire croit, c'est superstition. Là où va l'homme blanc le dimanche, c'est église, mais là où la femme noire va, c'est secte. L'homme blanc vénère Dieu Tout-Puissant, mais la femme noire vénère Satan ou Belzébuth. Toute chose-là que

l'homme blanc accepte dans son coeur, c'est chose qu'est sensée dans le monde, mais ce que femme noire accepte dans son coeur, c'est bêtise qui vaut pas ti-centime.

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« Car voici la vérité : chaque jour contient bien plus que la somme de ses heures, de ses minutes, de ses secondes. De fait, il ne serait pas exagéré de dire que chaque jour contient en son sein toute l’histoire. »

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Les livres débutent tous quelque part, mais ce début ne se trouve pas au même endroit pour tous.
Pour toi, lecteur, les choses commencent au chapitre 1, avec la première phrase - Il était une fois une léproserie en Jamaique. Mais pour l'écrivain, l'histoire a très bien pu commencer ailleurs.

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La nouvelle du scalp de Kaia s’est répandue comme une trainée de poudre. Alors que le garçon, assis sur la véranda écoute histoire du Prêcher volant, sa propre histoire a déjà pris son envol comme cancan voyage de bouche-cancan en bouche-cancan. Les oreilles ne veulent qu’une chose : savoir. L’histoire s’est mise à voyager encore plus vite dès lors qu’on a vu le gamin descendre

à Angola et en revenir avec Soft-Paw, le caïd. Chacun en apprenant l’histoire veut être le premier à la raconter, de sorte qu’elle file de palissade en palissade de téléphone et téléphone, faisant plusieurs fois le tour d’Augustown. Les premiers à l’avoir diffusée sont heureux de la recevoir à nouveau d’autres bouches, comme un cadeau rendu. Ils peuvent alors dire : « Yes,

man ! C’est seulement maintenant que t’apprends ça ? Eeeh, quelle histoire ! »

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Elle sait identifier l'odeur de la maison en bois qui se tient derrière elle, celle de la palissade en zinc qui commence à rouiller, celle du poulailler et jusqu'à celle des cinq poules, chacune bien différente de l'odeur suffocante du coq. Elle sait identifier l'odeur des mangues et des cerises et celles des pommes otaheite qui sont toute en train de mûrir. Enfin, elle connaît chaque odeur

du quotidien d'Augustown; des odeurs lointaines mais distinctes : l'odeur du feu de bois, celle de la semoule de maïs que l'on touille, celle du riz brisé en train de cuire, celle de la sueur des femmes noires penchées au-dessus des marmites, celles de la sueur des hommes noirs debout dans les rues.

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C’est l’histoire d’un homme qu’essaie d’accomplir quelque chose de beau, qu’essaie d’aller plus haut que ce qu’on pense qu’un homme comme lui est capable d’atteindre…

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Et je sais que vous étiez venus à l'église comme moi, avec une pierre bien-bien grosse qui pesait sur vot' cœur. C'est toujours comme ça pour nous. On est un peuple humilié qu'a besoin d'être relevé. On est un peuple droit qui cherche refuge dans l'inébranlable citadelle de Dieu.

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Les personnes aveugles entendent, goûtent et sentent mieux que les autres.

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Agathe Lazare apprit alors qu'au moment où un rêve est impitoyablement foulé aux pieds, au lieu de se faner, il explose, tant la douleur et la déception sont violentes.

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A l’époque, il y avait à Augustown plein d’histoires différentes : celles de la Bible et celle d’Anansè l’Araignée ; celles des livres et celles des bouches-cancans ; celles lues lumière-la-bougie et celles racontées lueur-la-lune. Mais la division était toujours nette entre les histoires qui étaient décrites et celles qui étaient racontées – entre les premières qui avaient

un parfum de neige et de terres éloignées et celles qui avaient l’odeur de leur propre sueur.

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Car, ce n'est pas la première procession, bien sûr. Ils avaient déjà marché le 1er août 1838, ce jour qu'on appelle depuis le Matin d'Août. Ils avaient alors posé d'immenses paniers sur leur tête et quitté les domaines de Mona et de Papine, se dirigeant toujours tout droit et sachant que, cette fois-ci, le Maître ne pourrait pas envoyer ses chiens à leurs trousses. La reine Victoria

avait signé le document qui leur rendait la liberté. Leurs pieds étaient encore surpris de pouvoir désormais aller où ils voulaient, même si là où les anciens voulaient aller, c'était de l'autre côté de l'océan, et pour cela, il leur aurait fallu des ailes.
Ils n'étaient pas allés loin : à peine deux kilomètres, jusqu'à cette vallée qu'ils avaient appelée Augustown, la

Ville d'Août, comme si c'était la liberté même qu'ils venaient de recevoir. La déception, ils l'apprendraient avec le temps. Il n'y avait là aucune liberté ; on n'en avait pas fini avec le jour du Maître. Le Maître avait juste changé de nom. Ce n'était plus Buckra, Maît' ou Massa, mais Patron, Miss, Sergent. Parfois même, le Maître avait changé de peau, passant du blanc au noir, ce

qui rendait cette histoire de liberté encore plus compliquée. La marche serait encore longue ; un long voyage les attendait. + Lire la suiteCommenter  J’apprécie          10