Ambrose Bierce
Ambrose Bierce

Frontière : en géographie politique, ligne imaginaire entre deux nations, séparant les droits imaginaires de l'une des droits imaginaires de l'autre.

Howard Bloom
Howard Bloom

Bernhard Riemann obtint le portrait en paysage mathématique d'une "variété topographique en N dimensions", plus connue de ses amis sous le nom d'espace courbé. Einstein pensa qu'il pouvait appliquer cette vision imaginaire du monde à l'univers dans lequel nous vivons : un cosmos doté de trois dimensions tangibles, la hauteur, la largeur et la profondeur, et une dimension supplémentaire : le

temps. (…) Einstein utilisa le modèle mathématique créé par Bernhard Riemann pour tout prédire, de l'énergie atomique au déplacement de la lumière, mais au lieu d'employer des mathématiques pour construire des modèles, nos esprits utilisent le plus souvent des métaphores. Nos cerveaux sont des machines à dessiner des images.

Annie Le Brun
Annie Le Brun

[…] le fait que le roman noir devienne le lieu imaginaire où la prison est niée par l'idée d'un plaisir obscur et souverain, garanti par l'enfermement, prend une valeur révolutionnaire qui déjoue cependant une fois encore tout ancrage historique. Comme si là contre tout espoir, la sensibilité plurielle offrait à chacun de déterminer inconsciemment son espace, au plus loin de la cité et

de son ordre, là où l'écume naît indifféremment de la décomposition ou de l'effervescence de la vie.

Metropolitan Museum of Art
Metropolitan Museum of Art

Rembrandt : Aristote contemplant le buste d'Homère (1653)

Ce portrait imaginaire montre Aristote pensif, posant la main sur un buste d'Homère, poète épique d'un autre âge. Aristote porte une chaîne en or d'où pend un médaillon à l'effigie de son élève Alexandre le Grand.

Wangyal Rinpo Tenzin
Wangyal Rinpo Tenzin

Posez le regard sur l'espace. Il est utile de regarder un grand vide, comme le ciel, mais on peut pratiquer même dans une petite pièce en fixant l'espace compris entre le corps et le mur. Restez stable et calme. Laissez le corps détendu. Au lieu de vous concentrer sur un point imaginaire de l'espace, laissez l'esprit s'épancher tout en maintenant une forte présence.

Nous appelons cela "dissoudre l'esprit dans l'espace", ou "mêler l'esprit à l'espace

Alexis de Tocqueville
Alexis de Tocqueville

Il y a un préjugé naturel qui porte l’homme à mépriser celui qui a été son inférieur, longtemps encore après qu’il est devenu son égal ; à l’inégalité réelle que produit la fortune ou la loi, succède toujours une inégalité imaginaire qui a ses racines dans les mœurs ; mais chez les anciens, cet effet secondaire de l’esclavage avait un terme. L’affranchi ressemblait si

fort aux hommes d’origine libre, qu’il devenait bientôt impossible de le distinguer au milieu d’eux.

Boris Pasternak
Boris Pasternak

C'était la première fois que j'allais à l'étranger.

Tout était inhabituel, autre, comme si ce n'était pas la vie, mais un rêve, comme si l'on participait à une représentation théâtrale imaginaire et ne comportant aucune obligation pour quiconque.

Vous ne connaissez personne ; personne pour vous en remontrer.

Une longue rangée de portières qui

s'ouvrent et qui claquent tout au long du wagon, une portière par compartiment ; quatre voies ferrées le long d'une estacade circulaire surplombant les rues, les canaux, les écuries de courses, les arrière-cours de la ville gigantesque. Des trains se rattrapant, se dépassant, allant de pair ou se croisant. Les lumière des rues qui se dédoublent, se croisent et s'entrecroisent sous les

ponts., les lumières des premiers et des deuxièmes étages des maisons au niveau des voies surélevées, dans les buffets de gare les machines automatiques illuminées de différentes couleurs, crachant des cigares, des confiseries, des amandes sucrées.

Julia Kristeva
Julia Kristeva

PROUST 2/
La métaphore est la figure la plus célèbre du style proustien...

J.K. : A la métaphore classique, définie traditionnellement par le télescopage de deux termes divergents, « la terre est bleue comme une orange », « l’homme est un roseau », Proust a adjoint un substrat qui est la sensation. C’est pour lui l’« impression » ultime à atteindre, d’abord

dans l’introspection, en se penchant sur la mémoire, en rassemblant deux instants séparés dans le temps et l’espace, et en les réunissant dans les « anneaux » de sa syntaxe hyperbolique. Les mots proustiens avancent par deux (la madeleine de Maman / la madeleine de Tante Léonie ; les dalles de Saint-Marc / les dalles de la cour des Guermantes), et chacun d’eux comporte au moins trois

strates : son/sens/sensation. On obtient ainsi ce style qu’il appelle « vision » et où l’abstraction verbale rejoint la chair, l’incarnation, l’expérience sensorielle et passionnelle.

Mon ambition est d’amener le lecteur à la même alchimie. L’univers de la lecture, en particulier de Proust, peut nous conduire à faire ressusciter cette expérience sensorielle, les

odeurs des aubépines, le goût de la madeleine, le bruit des dalles de Saint-Marc ou des cuillers de chez les Guermantes, tous ces petits détails de la vie quotidienne qui font la richesse de la vie psychique, de la vie tout simplement.

On connaît aussi la « phrase de Proust »...

J.K. : L’autre procédé, que mon attention au langage informée par la psychanalyse,

mais aussi par la linguistique, m’a fait déplier, c’est en effet la subtilité de la syntaxe. Tout le monde relève la virtuosité de la phrase proustienne, mais peu ont voulu vraiment l’étudier de près. De fait, la phrase proustienne est tellement riche que même les différentes théories syntaxiques actuelles, pourtant fort complexes, n’arrivent pas à en rendre compte. J’ai été

obligée de faire des entorses aux théories classiques, y compris les plus contemporaines, pour décrire ces emboîtements infinis qui permettent à la phrase proustienne de sortir de la linéarité du temps qui passe, de créer ce tissage temporel si particulier, qui fait penser à la temporellité de Heidegger, mais s’en différencie profondément en dépassant le souci dans la joie.

La complexité est telle que parfois, ces phrases sont construites par l’éditeur du texte...

J.K. : Les premiers éditeurs ont eu beaucoup de mal, notamment pour les derniers textes, et ont retenu une variante possible qui leur paraissait la plus cohérente. Mais si on se reporte aux manuscrits, c’est beaucoup plus compliqué. On y voit par exemple comment Proust mourant a

gardé une sorte de vigilance jusqu’à la dernière phrase, en reprenant les thèmes centraux, en résorbant d’autres plus pathétiques qui l’angoissaient initialement, pour arriver à condenser ce qui est l’essentiel, c’est-à-dire l’entrée du temps à l’intérieur de l’être humain. Avoir conduit ce train de pensées extrêmement complexes dans une seule phrase et avec une main

tremblante dans l’agonie, c’est magistral, rare, c’est unique. Pouvoir se priver de cette faiblesse qu’est l’apitoiement sur sa propre mort, c’est le fait d’un génie.

A la fin de votre travail sur Proust, ne fixez-vous pas un programme au roman français, et à la romancière que vous êtes.

J.K. : Je compare l’époque que nous vivons à la fin de

l’Empire romain, sans la promesse d’une nouvelle religion. C’est au roman de proposer un imaginaire correspondant à cette actualité et sans la complaisance de la culture-spectacle. Alors, la question se pose : comment écrire ce récit critique, incarné, sensible, qui pourrait être transmissible à un grand public, ce qui est, si on considère son histoire, la vocation du roman ?


Sans pour autant avoir de programme, je pense que le témoignage de Proust (qui s’oppose à Mallarmé mais n’oublie pas l’ambition musicale des avant-gardes, par exemple), va dans le sens d’une reprise, d’une synthèse entre ce qui relève de la recherche formelle et les préoccupations sociales ou métaphysiques. Cette cathédrale proustienne reste plus actuelle que jamais.


Malgré les apparences d’intégration, mon expérience de l’actualité est une expérience de douleur. Je me sens une étrangère en France et je suis très sensible au mal, ici comme ailleurs ; en moi et chez les autres. C’est ce que reflète mon dernier roman, « le Vieil Homme et les Loups ». J’envisage de poursuivre cette écriture en accentuant l’aspect « roman policier

» de mon livre. Le roman policier a l’avantage d’affronter directement la violence, la douleur et le mal et d’être une forme souple, qui touche le plus grand nombre, tout en réservant un univers d’insolite pour le langage comme pour la réflexion. Ce sera un policier métaphysique...

Propos recueillis par Alain Nicolas
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Judith P. Butler
Judith P. Butler

"Les individus transsexuels revendiquent souvent une discontinuité radicale entre les plaisirs sexuels et les parties du corps.Très souvent, la recherche du plaisir requiert d'investir par l'imagination les parties du corps-appendices ou orifices- qu'il n'est pas nécessaire de posséder en propre; il se peut également que le plaisir requière d'imaginer toutes sortes de parties exagérément

grandes ou petites. Bien sûr, le statut imaginaire du désir ne se limite pas l'identité transsexuelle; la nature fantasmatique du désir révèle que le corps n'en est ni le fondement ni la cause, mais qu'il en est l'occasion et l'objet. La stratégie du du désir consiste en partie à transfigurer le corps désirant lui-même. En réalité, pour pouvoir désirer tout simplement, il est

peut-être nécessaire de croire en un moi corporel transformé qui, selon les règles genrées de l'imaginaire, pourrait remplir les exigences d'un corps capable de désirer. Cette condition imaginaire du désir excède toujours le corps physique à travers ou sur lequel il travaille."p166 + Lire la suiteCommenter  J’apprécie          30

Alaa El Aswany
Alaa El Aswany

Il y a longtemps que je me pose la question suivante:qu'est-ce qui pousse un lecteur intelligent et cultivé à considérer que le comportement d'un personnage littéraire dans une histoire imaginaire vise à offenser la religion ou un groupe social?