Gaston Bachelard
Gaston Bachelard

Les mots — je l'imagine souvent — sont de petites maisons, avec cave et grenier. Le sens commun séjourne au rez-de chaussée, toujours prêt au « commerce extérieur », de plain-pied avec autrui, ce passant qui n'est jamais un rêveur. Monter l'escalier dans la maison du mot c'est, de degré en degré, abstraire. Descendre à la cave, c'est rêver, c'est se perdre dans les lointains

couloirs d'une étymologie incertaine, c'est chercher dans les mots des trésors introuvables. Monter et descendre, dans les mots mêmes, c'est la vie du poète. Monter trop haut, descendre trop bas est permis au poète qui joint le terrestre à l'aérien. Seul le philosophe sera-t-il condamné par ses pairs à vivre toujours au rez-de-chaussée?

Catherine Baker
Catherine Baker

Contre lui, une seule solution, la fuite. L’absentéisme reste LA réponse adéquate de qui veut échapper au massacre. N’est sauvé-e que cellui, de la maternelle à Polytechnique, qui se sauve, qui s’échappe. L’absentéisme en commun s’appelle parfois une grève, mais, aussi bien chez les élèves que chez les enseignant-e-s, celle-ci n’aurait d’intérêt qu’illimitée.

Emmanuel Barbier
Emmanuel Barbier

Il y a un principe fondamental, commun à toutes ces sectes, et sur lequel toutes leurs théories reposent. C'est l'ésotérisme, c'est-à-dire l'existence d'une tradition secrète, la conservation d'un enseignement réservé aux seuls initiés, qui se serait perpétué depuis l'antiquité à travers les âges, que Jésus-Christ lui-même aurait recueilli et communiqué à quelques-uns de ses

disciples pour être gardé avec le même soin au sein du christianisme, et qui, défiguré ou trahi par l'Église, aurait été fidèlement recueilli par les sectes occultes dont la chaîne ininterrompue se rattacherait aux origines mêmes du christianisme. Celles-ci se trouveraient donc avoir hérité de la mission de l'Église. Et leur mission est identiquement celle de la Franc-Maçonnerie.

Emmanuel Barbier
Emmanuel Barbier

Il y a un principe fondamental, commun à toutes ces sectes, et sur lequel toutes leurs théories reposent. (…) Leur thème commun, c'est une explication du monde permettant d'écarter le dogme de la création et conduisant à la divinisation de l'homme. De là, le panthéisme émanatiste qui se retrouve au fond de presque tous ces systèmes.

Jean Baudrillard
Jean Baudrillard

Ce que nous donnent les communications de masses, ce n'est pas la réalité, c'est le vertige de la réalité. Ou encore, sans jeu de mots, une réalité sans vertige.

Jean Baudrillard
Jean Baudrillard

Les conduites de consommation, apparemment axées, orientées sur l'objet et la jouissance, répondent en fait à de tout autres finalités : celle d'expression métaphorique ou détournée du désir, celle de production, à travers les signes différentiels, d'un code social de valeurs. Ce n'est donc pas la fonction individuelle d'intérêt à travers un corpus d'objets qui est déterminante,

c'est celle, immédiatement sociale, d'échange, de communication, de distribution des valeurs à travers un corpus de signes. La vérité de la consommation, c'est qu'elle est non une fonction de jouissance, mais une fonction de production -- et donc, tout comme la production matérielle, une fonction non pas individuelle, mais immédiatement et totalement collective.

Alain de Benoist
Alain de Benoist

Le terroriste moderne est le lointain descendant du combattant irrégulier des guerres de partisans. La différence est qu’il vise désormais des cibles indistinctes et qu’il agit à l’échelle mondiale, ce qui veut dire qu’il s’est « déterritorialisé ». Le terrorisme global est à l’image de notre temps : trasnational, fluide, organisé en réseaux. […] Les victimes des bombes

ne sont jamais la cible principale du terrorisme. Celui-ci vise avant tout les gouvernements et les opinions publiques. Les victimes immédiates ne sont pas des fins en soi, mais des moyens pour faire pression et frapper les esprits. Les médias, contraints de faire leurs gros titres sur l’événement, en sont le relais principal et, objectivement, les auxiliaires majeurs. […] En outre, même

s’il existe un lien entre eux, ce serait une grave erreur de confondre l’islam avec l’islamisme et l’islamisme avec le terrorisme. Il importe surtout de comprendre que, si les terroristes commettent des actes criminels, ce ne sont ni des « fous », ni des « criminels de droit commun », ni même des « fanatiques » dénués de toute rationalité. Leurs actes sont d’abord des actes

politiques. Ils sont la conséquence de situations politiques concrètes.

Joseph Bertrand
Joseph Bertrand

Une vingtaine de jeunes gens, choisis parmi les plus habiles des universités danoises, étaient employés aux observations et aux calculs. Véritables apprentis astronomes, ils s’instruisaient en voyant travailler leur maître; guidée par l’esprit ardent et communicatif de son chef, la petite colonie sembla bientôt ne former qu’une seule famille; sans inquiétude comme sans ambition, ces

jeunes gens d’élite, unis par le même lien qui les attachait à la science, préoccupés des mêmes problèmes et attentifs aux mêmes phénomènes, s’animaient les uns les autres en se prêtant une mutuelle et cordiale assistance.

Tout semblait autour d’eux conspirer au même dessein et les inviter au travail; respirant pour ainsi dire l’amour de l’astronomie, ils

s’empressaient d’apporter au trésor commun leur butin de chaque jour, heureux de penser qu’il devait vivre à jamais, et sans se soucier d’y attacher leur nom.

Abel Bonnard
Abel Bonnard

Quand une société qui ne vit plus que par survivance se désagrège en hommes épars, qui ne sont sauvés de leur pauvreté intérieure par aucun rapport avec un fonds commun à tous, sans terroir, sans religion, sans disciplines, fonctionnaires ennuyés de leur emploi, artisans dépris de leur métier, ouvriers qui n'aiment plus leur besogne et qui ont, trop souvent, une besogne qu'ils ne

peuvent pas aimer, comment ces individus désintégrés pourraient-ils essayer de revivre autrement que par des opinions révolutionnaires? Comment le grain de poussière rentrerait-il dans le drame universel, sinon par la turbulence des vents?

Charles Bossut
Charles Bossut

Les Arabes portèrent le goût des mathématiques dans tous les pays soumis à leur puissance. Elles fleurirent pendant longtemps en Espagne. […] Les Chrétiens, qui, dès le Xe siècle, avaient commencé à chasser les Arabes de quelques parties de l'Espagne, ne dédaignèrent pas de s'instruire parmi ces mêmes Maures dont ils abhorraient la religion. […] Les intérêts de l'ambition, à qui

rien ne résiste, finirent par rompre toute communication entre les Chrétiens et les Maures, et plongèrent l'Espagne dans les plus profondes ténèbres. A mesure que les victoires des premiers se mulipliaient, les sciences allaient en déclinant : elles périrent enfin, quand la domination des Maures cessa en Espagne, par la perte de Grenade : événement a jamais déplorable, si la religion

chrétienne n'en eût profité, en s'étendant sur les ruines du Mahométisme.