Gaston Bachelard
Gaston Bachelard

Novalis, le Touchant

Cette valorisation substantielle qui fait de l’eau un lait inépuisable, le lait de la nature Mère, n’est pas la seule valorisation qui marque l’eau d’un caractère profondément féminin. Dans la vie de tout homme, ou du moins dans la vie rêvée de tout homme, apparaît la seconde femme l’amante ou l’épouse. La seconde femme va aussi être

projetée sur la nature. A côté de la mère-paysage prendra place la femme-paysage. Sans doute les deux natures projetées pourront interférer ou se recouvrir. Mais il est des cas où l’on pourra les distinguer. Nous allons donner un cas où la projection de la femme-nature est très nette. En effet, un rêve de Novalis va nous apporter de nouvelles raisons pour affirmer le substantialisme

féminin de l’eau.
Après avoir trempé ses mains et humecté ses lèvres dans un bassin rencontré en son rêve, Novalis est pris d’un « désir insurmontable de se baigner ». Aucune vision ne l’y invite. C’est la substance même qu’il a touchée de ses mains et de ses lèvres qui l’appelle. Elle l’appelle matériellement, en vertu, semble-t-il, d’une participation

magique. Le rêveur se déshabille et descend dans le bassin. Alors seulement les images viennent, elles sortent de la matière, elles naissent, comme d’un germe, d’une réalité sensuelle primitive, d’une ivresse qui ne sait pas encore se projeter « De toutes parts surgissaient des images inconnues qui se fondaient, également, l’une dans l’autre, pour devenir des êtres visibles et

entourer [le rêveur], de sorte que chaque onde du délicieux élément se collait à lui étroitement ainsi qu’une douce poitrine. Il semblait que dans ce flot se fût dissous un groupe de charmantes filles qui, pour un instant, redevenaient des corps au contact du jeune homme. » Page merveilleuse d’une imagination profondément matérialisée, où l’eau, – en son volume, en sa masse,

– et non plus dans la simple féerie de ses reflets, apparaît comme de la jeune fille dissoute, comme une essence liquide de jeune fille, « eine Auflösung reizender Mädchen ». Les formes féminines naîtront de la substance même de l’eau, au contact de la poitrine de l’homme, quand, semble-t-il, le désir de l’homme se précisera. Mais la substance voluptueuse existe avant les formes

de la volupté. Nous méconnaîtrions un des caractères singuliers de l’imagination de Novalis, si nous lui attribuions trop rapidement un complexe du Cygne. II faudrait pour cela avoir la preuve que les images primitives sont les images visibles. Or, il ne semble pas que les visions soient actives. Les charmantes jeunes filles ne tardent pas à se redissoudre dans l’élément et le rêveur

« enivré de ravissement » continue son voyage sans vivre aucune aventure avec les jeunes filles éphémères. Les êtres du rêve, chez Novalis, n’existent donc que lorsqu’on les touche, l’eau devient femme seulement contre la poitrine, elle ne donne pas des images lointaines. Ce caractère physique très curieux de certains rêves novalisiens nous semble mériter un nom. Au lieu de dire

que Novalis est un Voyant qui voit l’invisible, nous dirions volontiers que c’est un Touchant qui touche l’intouchable, l’impalpable, l’irréel. Il va plus au fond que tous les rêveurs. Son rêve est un rêve dans un rêve, non pas dans le sens éthéré, mais dans le sens de la profondeur. Il s’endort dans son sommeil même, il vit un sommeil dans le sommeil. Qui n’a pas désiré,

sinon vécu, ce deuxième sommeil, dans une crypte plus cachée ? Alors les êtres du rêve s’approchent davantage de nous, ils viennent nous toucher, ils viennent vivre dans notre chair, comme un feu sourd. + Lire la suiteCommenter  J’apprécie          20

Lyman Frank Baum
Lyman Frank Baum

Tout autour d'elle s'étendaient des pelouses charmantes et des vergers aux arbres chargés de fruits mûrs. De chaque côté du chemin, des massifs de fleurs déployaient leurs corolles, et des oiseaux rares au plumage chamarré voletaient en chantant parmi les fleurs et les branches des arbres. A quelque distance de là, un ruisseau argenté coulait entre deux rives verdoyantes. 

Jack Vance
Jack Vance

Trente des plus charmantes femmes de Pao, prêtes à satisfaire vos caprices.
Palafox réplique avec désinvolture : « Une fois égorgées et enterrées, elles pourraient faire un engrais acceptable. Je vois mal à quel autre usage je pourrais les employer. »

Apollonios de Rhodes
Apollonios de Rhodes

Je chantais, et sur leur sommet neigeux les sirènes restaient muettes d'étonnement ; leurs chants avaient cessé. L'une jeta sa flûte, l'autre jeta sa cithare, et elles soupirèrent profondément, car l'heure fatale de leur mort était venue. Du sommet des rochers elles se précipitèrent elles-mêmes dans les ondes mugissantes de l'abîme : leurs beaux corps dont les formes étaient si

charmantes furent changés en rochers.

Guy des Cars
Guy des Cars

Il existe ainsi de par le monde une foule de créatures quelconques qui plaisent on ne sait trop pourquoi alors que d’autres, infiniment plus charmantes et plus jolies, sont laissées pour compte...

Janet Frame
Janet Frame

Il est un aspect de la folie qu’on mentionne rarement dans les romans car il porterait atteinte à l’idée romantique que les gens se font des fous. Ils les considèrent en effet comme des êtres dont les discours offrent de prime abord un attrait poétique. Mais la réalité ressemble rarement à la douce lamentation qu’une Ophélie déclame sur un ton monocorde ou aux extravagances

verbales que les auteurs en mal de poésie prêtent à quelque Jeanne la Folle. Le goût populaire aurait rarement considéré comme des héroïnes acceptables les femmes qui erraient sans but dans la salle de jour. Bien peu appartenaient à cette catégorie de charmantes toquées qui se laissent aller sans retenue à leurs excentricités. Dans l’ensemble, elles provoquaient surtout de

l’irritation, de l’hostilité et de l’impatience. Devant elles, on se sentait honteux et embarrassé. Elles pleuraient et gémissaient. Elles se disputaient et se lamentaient. Leur folie était un fléau et on la traitait comme telle. On oubliait qu’elles possédaient une âme, cette âme humaine dont on fait tant de cas et qui a besoin pour s’épanouir de tant d’attentions et

d’amour. On oubliait même qu’il était possible d’extraire de ce marécage humain une toute petite goutte de poésie. + Lire la suiteCommenter  J’apprécie          10

Pierre Bellemare
Pierre Bellemare

Chaque pays, chaque région, a ses coutumes, qui font partie du folklore et que tout le monde trouve charmantes avec leur côté un peu désuet.
Prenez par exemple cette pittoresque tradition sicilienne . l’enlèvement amoureux. Quand le prétendant d’une jeune fille est éconduit par celle-ci ou par ses parents, il lui reste encore une solution : l’enlever. Avec quelques amis, il

s’arrange pour organiser le rapt. Il emmène l’élue de son cœur dans une retraite secrète et il consomme le mariage avant la cérémonie.

Claude Anet
Claude Anet

On avait beaucoup parlé de l’ingénieur sans jamais alléguer à son sujet rien de précis. Puis son nom fut mêlé à une histoire douloureuse arrivée dans la ville l’année précédente. Une des plus charmantes jeunes filles de la société s’était suicidée à dix-huit ans. Les causes de ce suicide restèrent inconnues. C’était un de ces cas de dégoût de vivre si fréquents dans

la jeunesse russe dont les nerfs exaltés et faibles à la fois sont souvent incapables de résister aux premiers chocs de la vie.