Philipp von Boeselager
Philipp von Boeselager

Au dessert, certains de ces messieurs se plaignirent qu'il n'y eût plus de fraises au quartier général du Führer, et que l'on dût se rabattre sur des cerises — ce qui était désagréable à cause du noyau. Pour finir, quelques-uns, échauffés par la boisson, demandèrent tout haut qui irait le soir venu s'occuper galamment des demoiselles du groupe Kraft Durch Freude en séjour à

Winniza.

Philipp von Boeselager
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J'étais obsédé par une question : était-il encore bien nécessaire d'exécuter cet attentat? Cette question, Stauffenberg l'avait posée à Tresckow quelques jours avant l'attentat. A quoi bon risquer sa vie, et surtout celle de dizaines d'autres individus, alors que la situation militaire ne laissait plus présager que quelques mois de dictature? Tresckow avait apporté une réponse sans

détour, comme à son habitude : « L'attentat doit avoir lieu, coûte que coûte. Quand bien même il ne devrait pas réussir, il faut y aller. Car ce n'est même plus l'objet de l'attentat dont il s'agit, mais plutôt le fait de montrer au monde entier et à L'Histoire que le mouvement de résistance allemande a osé jouer le tout pour le tout, au péril de sa vie. Tout le reste, finalement,

n'est que très secondaire. »

Philipp von Boeselager
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Désormais, j'avais devant les yeux la preuve de l'abominable. Il ne s'agissait donc pas de faits isolés commis par des individus dévoyés. C'était un plan rigoureux avalisé par les plus hautes instances. Il fallait se rendre à l'évidence : L'État, dans son ensemble, était vermoulu de vice et de crime. Et l'armée, par son silence, par son obéissance, se rendait complice du système. Cet

état de chose nous paraît aujourd'hui aveuglant de clarté. Il ne l'était nullement pour les contemporains, persuadés que l'Allemagne était un modèle de civilisation, qu'elle ne pouvait être tombée non seulement sous une dictature, mais dans un totalitarisme meurtrier.

Philipp von Boeselager
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« Au revoir, nous nous reverrons dans un monde meilleur. » Tresckow monta à bord de la voiture, qui démarra, emmenant vers la mort l'âme de cette vaste conjuration dont Oster avait été le cerveau, Beck la moelle épinière et Stauffenberg le bras armé. Tresckow avait posté, le matin du 21 juillet, une lettre d'adieux pour sa femme, maquillée en banale missive. Quelques jours

auparavant, il avait glissé dans un courrier à sa chère Erika une coupure de journal reprenant ce poème :