Cette trop grande confiance dans les théories, qui cause tout le mal, vient souvent d'une mauvaise éducation scientifique, dont le savant doit ensuite se corriger. Mieux vaudrait souvent qu'il fût ignorant. Il n'a plus l'esprit libre; il est enchaîné par des théories qu'il regarde comme vraies absolument. Un des plus grands écueils que rencontre l'expérimentateur, c'est donc d'accorder
trop de confiance aux théories. Ce sont les gens que J'appellerai des systématiques.
L'enseignement contribue beaucoup à produire ce résultat. Il arrive généralement que dans les livres et dans les cours on rend la science plus claire qu'elle n'est en réalité. C'est même là le mérite d'un enseignement de faculté de présenter la science avec un ensemble systématique dans lequel
on dissimule les lacunes pour ne pas rebuter les commençants dans la science. Or, les élèves prennent le goût des systèmes qui sont plus clairs et plus simples pour l'esprit, parce qu'on a simplifié sa science et élagué tout ce qui était obscur, et ils emportent de là l'idée fausse que les théories de la science sont définitives et qu'elles représentent des principes absolus dont
tous les faits se déduisent. C'est en effet ainsi qu'on les présente systématiquement.
Howard Bloom démontre que l'évolution repose fondamentalement sur la notion de partage de l'information. Il explique que nous sommes tous intégralement constitués de bouts d'informations et que c'est notre capacité même à les partager qui nous confère l'intelligence. Tout être humain refusant d'être informé ou de partager l'information, que ce soit sur le plan personnel ou sur celui du
bureau, prend le risque d'être éliminé par la société dans laquelle il évolue. (…) Howard Bloom montre que ce sont les systèmes d'information qui effectuent la sélection individuelle et qui créent les "chefs."
Pour développer de l’intelligence collective, les systèmes apprenants se focalisent sur les processus. Il faut savoir que leurs difficultés, les dysfonctionnements, résident presque toujours dans les interfaces internes qui se font mal car non pensées ou insuffisamment travaillées. On pourrait dire que l’apprentissage organisationnel commence par un repérage, une formalisation et une
remise à plat des processus.
La France ne contient pas un peuple mais cent, qui diffèrent par la conception de la vie et de la mort, par le système de parenté, par l'attitude face au travail ou à la violence. Du point de vue de l'anthropologie, la France ne devrait pas exister. La plupart des nations d'Europe et du monde, grandes ou petites — Angleterre, Allemagne, Russie, Japon, Suède, Irlande, Pologne par exemple —
ne sont d'une certaine façon, que des systèmes originels et homogènes, tribus anciennes et minuscules, démesurément gonflées par mille ans d'expansion démographique, pour atteindre aujourd'hui l'échelle de nation. Des pays comme l'Inde, la Yougoslavie, l'Espagne sont, au contraire, absolument hétérogènes, juxtapositions de peuples n'ayant pas réalisé leur unité linguistique et
administrative. […] La France […] n'a pas été fondée par aucun peuple particulier. Elle porte le nom d'un groupe germanique, parle une langue dérivée du latin, avec un fort accent gaulois nous disent les linguistes. Elle fut inventée par une communauté de peuples. Plus que tout autre nation au monde, elle est un défi vivant aux déterminations ethniques et culturelles.
Celui qui est muni de la légitimité du suffrage universel pensera davantage au pays tout entier, alors qu'hélas, aujourd'hui, d'aucuns ne semblent avoir pour horizon d'attente que le microcosme de la Coupole fédérale. (…) Mais enfin, aujourd'hui, les cantons, même bilingues (…), même multilingues (…) élisent directement leurs exécutifs, et ont inventé des systèmes d'équilibre
interne.
Si l'on peut découper dans l'univers des systèmes pour lesquels le temps n'est qu'une abstraction, une relation, un nombre, l'univers lui-même est autre chose.
Concluons donc que l'individualité n'est jamais parfaite, qu'il est souvent difficile, parfois impossible de dire ce qu'est un individu et ce qu'il n'est pas, mais que la vie n'en manifeste pas moins une recherche de l'individualité et qu'elle tend à constituer des systèmes naturellement isolés, naturellement clos.
Mettons-nous donc en face de cette réalité. Laissant de côté toute conception de la religion en général, considérons les religions dans leur réalité concrète et tâchons de dégager ce qu'elles peuvent avoir de commun; car la religion ne se peut définir qu'en fonction des caractères qui se retrouvent partout où il y a religion. Dans cette comparaison, nous ferons donc entrer tous les
systèmes religieux que nous pouvons connaître, ceux du présent et ceux du passé, les plus primitifs et les plus simples aussi bien que les plus récents et les plus raffinés; car nous n'avons aucun droit ni aucun moyen logique d'exclure les uns pour ne retenir que les autres. Pour celui qui ne voit dans la religion qu'une manifestation naturelle de l'activité humaine, toutes les religions
sont instructives sans exception d'aucune sorte; car toutes expriment l'homme à leur manière et peuvent ainsi nous aider à mieux comprendre cet aspect de notre nature. Nous avons vu, d'ailleurs, combien il s'en faut que la meilleure façon d'étudier la religion soit de la considérer de préférence sous la forme qu'elle présente chez les peuples les plus civilisés .
Chapitre
premier
Définition du phénomène religieux et de la religion + Lire la suiteCommenter  J’apprécie         10