Henri Bergson
Henri Bergson

Sans doute une chute est toujours une chute, mais autre chose est de se laisser choir dans un puits parce qu’on regardait n’importe où ailleurs, autre chose y tomber parce qu’on visait une étoile. C’est bien une étoile que Don Quichotte contemplait.

Howard Bloom
Howard Bloom

En employant la force, parfois de manière sadique, Rome réunit une masse stupéfiante de cités et de tribus. Elle permit ainsi un échange d'idées et de biens qui accéléra radicalement le rythme du progrès. Au cours des trois cents ans entre Auguste et Constantin, elle introduisit le pluralisme qui permit à des cultures extrêmement diversifiées de vivre pacifiquement. (…) Lors de la

chute de Rome, la moitié de la population du continent européen mourut au cours des deux cents ans qui suivirent. Car Rome était un oppresseur mais aussi la source de la nourriture et de la paix.

Abel Bonnard
Abel Bonnard

Rien ne fait tableau comme la chute et la ruine éblouissante d'un grand fleuve, et ce grondement de discours, ces arcs-en-ciel de poèmes, ces feux des idées trempés dans les gouttelettes des mots, ce n'est pourtant que l'Homme qui tombe.

George Gordon Byron
George Gordon Byron

Lettre à John Murray (son éditeur) du 6 avril 1819, à propos de Don Juan qu'il veut censurer : Ils ont fait de moi sans que je l'ai cherché une sorte d'idole populaire — ils ont — sans autre raison ni explication que le caprice de leur bon plaisir — renversé la statue de son piédestal — la chute ne l'a pas brisée —et ils voudraient paraient-il, l'y replacer —mais il n'en sera

rien.

Jean Cocteau
Jean Cocteau

Vivre est une chute horizontale

Alfred Hitchcock
Alfred Hitchcock

Troy Mason était un professionnel du hold-up - un vrai. Il avait trente ans et depuis trois ans il s'était spécialisé dans les banques.
De vingt-quatre à vingt-sept ans, il avait été en prison. De vingt à vingt-quatre, il avait braqué des sociétés de crédit et de temps à autre un supermarché. Il avait eu de la chance car, dans ses débuts, il le reconnaissait volontiers

maintenant, il avait travaillé en amateur et c'était miracle qu'il n'ait pas été pris lors de son premier coup. Mais, sa chance ne lui ayant jamais fait défaut, il avait peu à peu appris son métier. Sa chute à vingt-quatre ans n'était redevable qu'à la malchance, ce qui est toujours le cas lorsqu'un véritable professionnel se fait pincer.

Alexis de Tocqueville
Alexis de Tocqueville

La Révolution française ne sera que ténèbres pour ceux qui ne voudront regarder qu’elle ; c’est dans les temps qui la précèdent qu’il faut chercher la seule lumière qui puisse l’éclairer. Sans une vue nette de l’ancienne société, de ses lois, de ses vices, de ses préjugés, de ses misères, de sa grandeur, on ne comprendra jamais ce qu’ont fait les Français pendant le cours

des soixante années qui ont suivi sa chute ; mais cette vue ne suffirait pas encore si l’on pénétrait jusqu’au naturel même de notre nation.

Alexis de Tocqueville
Alexis de Tocqueville

VUE GÉNÉRALE DU SUJET
Je voudrais, avant de quitter pour jamais la carrière que je viens de parcourir, pouvoir embrasser d'un dernier regard tous les traits divers qui marquent la face du monde nouveau, et juger enfin de l'influence générale que doit exercer l'égalité sur le sort des hommes , mais la difficulté d'une pareille entreprise m'arrête , en présence d'un si grand objet,

je sens ma vue qui se trouble et ma raison qui chancelle.Cette société nouvelle, que j'ai cherché à peindre et que je veux juger, ne fait que de naître. Le temps n'en a point encore arrêté la forme , la grande révolution qui l'a créée dure encore, et, dans ce qui arrive de nos jours, il est presque impossible de discerner ce qui doit passer avec la révolution elle-même, et ce qui doit

rester après elle.Le monde qui s'élève est encore à moitié engagé sous les débris du monde qui tombe, et, au milieu de l'immense confusion que présentent les affaires humaines, nul ne saurait dire ce qui restera debout des vieilles institutions et des anciennes mœurs, et ce qui achèvera d'en disparaitre.Quoique la révolution qui s'opère dans l'état social, les lois, les idées, les

sentiments des hommes, soit encore bien loin d'être terminée, déjà on ne saurait comparer ses œuvres avec rien de ce qui s'est vu précédemment dans le monde. Je remonte de siècle en siècle jusqu'à l'antiquité la plus reculée , je n'aperçois rien qui ressemble à ce qui est sous mes yeux. Le passé n'éclairant plus l'avenir, l'esprit marche dans les ténèbres.Cependant, au milieu de

ce tableau si vaste, si nouveau, si confus, j'entrevois déjà quelques traits principaux qui se dessinent, et je les indique : Je vois que les biens et les maux se répartissent assez également dans le monde. Les grandes richesses disparaissent , le nombre des petites fortunes s'accroît , les désirs et les jouissances se multiplient , il n'y a plus de prospérités extraordinaires ni de

misères irrémédiables. L'ambition est un sentiment universel, il y a peu d'ambitions vastes. Chaque individu est isolé et faible , la société est agile, prévoyante et forte , les particuliers font de petites choses, et l'État d'immenses.Les âmes ne sont pas énergiques , mais les mœurs sont douces et les législations humaines. S'il se rencontre peu de grands dévouements, de vertus

très hautes, très brillantes et très pures, les habitudes sont rangées, la violence est rare, la cruauté presque inconnue. L'existence des hommes devient plus longue et leur propriété plus sûre. La vie n'est pas très ornée, mais très aisée et très paisible. Il y a peu de plaisirs très délicats et très grossiers, peu de politesses dans les manières et peu de brutalité dans les

goûts. On ne rencontre guère d'hommes très savants ni de populations très ignorantes. Le génie devient plus rare et les lumières plus communes. L'esprit humain se développe par les petits efforts combinés de tous les hommes, et non par l'impulsion puissante de quelques-uns d'entre eux. Il y a moins de perfection, mais plus de fécondité dans les œuvres. Tous les liens de race, de classe,

de patrie se détendent , le grand lien de l'humanité se resserre.Si parmi tous ces traits divers, je cherche celui qui me parait le plus général et le plus frappant, j'arrive à voir que ce qui se remarque dans les fortunes se représente sous mille autres formes. Presque tous les extrêmes s'adoucissent et s'émoussent , presque tous les points saillants s'effacent pour faire place à quelque

chose de moyen, qui est tout à la fois moins haut et moins bas, moins brillant et moins obscur que ce qui se voyait dans le monde.Je promène mes regards sur cette foule innombrable composée d'êtres pareils, où rien ne s'élève ni ne s'abaisse. Le spectacle de cette uniformité universelle m'attriste et me glace, et je suis tenté de regretter la société qui n'est plus.Lorsque le monde

était rempli d'hommes très grands et très petits, très riches et très pauvres, très savants et très ignorants, je détournais mes regards des seconds pour ne les attacher que sur les premiers, et ceux-ci réjouissaient ma vue , mais je comprends que ce plaisir naissait de ma faiblesse : c'est parce que je ne puis voir en même temps tout ce qui m'environne qu'il m'est permis de choisir

ainsi et de mettre à part, parmi tant d'objets, ceux qu'il me plait de contempler. Il n'en est pas de même de l'Être tout-puissant et éternel, dont l'œil enveloppe nécessairement l'ensemble des choses, et qui voit distinctement, bien qu'à la fois, tout le genre humain et chaque homme.Il est naturel de croire que ce qui satisfait le plus les regards de ce créateur et de ce conservateur des

hommes, ce n'est point la prospérité singulière de quelques-uns, mais le plus grand bien-être de tous : ce qui me semble une décadence est donc à ses yeux un progrès , ce qui me blesse lui agrée. L'égalité est moins élevée peut-être , mais elle est plus juste, et sa justice fait sa grandeur et sa beauté.Je m'efforce de pénétrer dans ce point de vue de Dieu, et c'est de là que je

cherche à considérer et à juger les choses humaines. Personne sur la terre ne peut encore affirmer d’une manière absolue et générale que l’état nouveau des sociétés soit supérieur à l'état ancien , mais il est déjà aisé de voir qu'il est autre.Il y a de certains vices et de certaines vertus qui étaient attachés à la constitution des nations aristocratiques, et qui sont

tellement contraires au génie des peuples nouveaux qu'on ne saurait les introduire dans leur sein. Il y a de bons penchants et de mauvais instincts qui étaient étrangers aux premiers et qui sont naturels aux seconds , des idées qui se présentent d'elles-mêmes à l'imagination des uns et que l'esprit des autres rejette. Ce sont comme deux humanités distinctes, dont chacune a ses avantages et

ses inconvénients particuliers, ses biens et ses maux qui lui sont propres.Il faut donc bien prendre garde de juger les sociétés qui naissent avec les idées qu'on a puisées dans celles qui ne sont plus. Cela serait injuste, car ces sociétés, différant prodigieusement entre elles, sont incomparables.Il ne serait guère plus raisonnable de demander aux hommes de notre temps les vertus

particulières qui découlaient de l'état social de leurs ancêtres, puisque cet état social lui-même est tombé, et qu'il a entraîné confusément dans sa chute tous les biens et tous les maux qu'il portait avec lui.Mais ces choses sont encore mal comprises de nos jours.J'aperçois un grand nombre de mes contemporains qui entreprennent de faire un choix entre les institutions, les opinions,

les idées qui naissaient de la constitution aristocratique de l'ancienne société , ils abandonneraient volontiers les unes, mais ils voudraient retenir les autres et les transporter avec eux dans le monde nouveau.Je pense que ceux-là consument leur temps et leurs forces dans un travail honnête et stérile.Il ne s'agit plus de retenir les avantages particuliers que l'inégalité des conditions

procure aux hommes, mais d’assurer les biens nouveaux que l’égalité peut leur offrir.Nous ne devons pas tendre à nous rendre semblables à nos pères, mais nous efforcer d'atteindre l'espèce de grandeur et de bonheur qui nous est propre.Pour moi qui, parvenu à ce dernier terme de ma course, découvre de loin, mais à la fois, tous les objets divers que j'avais contemplés à part en

marchant, je me sens plein de craintes et plein d'espérances. Je vois de grands périls qu'il est possible de conjurer , de grands maux qu'on peut éviter ou restreindre, et je m'affermis de plus en plus dans cette croyance que, pour être honnêtes et prospères, il suffit encore aux nations démocratiques de le vouloir.Je n'ignore pas que plusieurs de mes contemporains ont pensé que les

peuples ne sont jamais ici-bas maîtres d'eux-mêmes, et qu'ils obéissent nécessairement à je ne sais quelle force insurmontable et inintelligente qui nait des événements antérieurs, de la race, du sol ou du climat.Ce sont là de fausses et lâches doctrines, qui ne sauraient jamais produire que des hommes faibles et des nations pusillanimes : la Providence n'a créé le genre humain ni

entièrement indépendant, ni tout à fait esclave. Elle trace, il est vrai, autour de chaque homme, un cercle fatal dont il ne peut sortir , mais, dans ses vastes limites, l'homme est puissant et libre , ainsi des peuples.Les nations de nos jours ne sauraient faire que dans leur sein les conditions ne soient pas égales , mais il dépend d'elles que l'égalité les conduise à la servitude ou à

la liberté, aux lumières ou à la barbarie, à la prospérité ou aux misères.
p. 451 - 455 + Lire la suiteCommenter  J’apprécie          00

Federico Garcia Lorca
Federico Garcia Lorca


Extrait de la préface signée Jean Cassou ( Poète français 1897-1986 ) :

Le printemps 1931 qui vit la chute d'Alphonse XIII et l’avènement de la République espagnole s'accompagna , dans les années qui avaient précédé le 14 avril et celles qui le suivirent , d'une autre belle saison , un long printemps poétique

Tout un groupe de jeunes poètes , Federico

Garcia Lorca , Pedro Salinas ,Jorge Guillen , Rafael Alberti , José Bergamin , Luis Cernuda , Manuel Altolaguirre , Damaso Alonso , Vicente Aleixandre , tant d'autres encore , avait succédé à ceux de la fameuse génération de 1898 , elle-même riche en grands lyriques , Unamuno ,Machado , et à Juan Ramon Jimenez .

Le coup d'état de Franco interrompit cette brillante renaissance

des lettres espagnoles .

La plupart de ses écrivains sont morts en exil ou y poursuivent leur oeuvre .

Miguel de Unamuno est mort en zone franquiste , à Salamanque , gardé à vue dans sa maison après avoir été frappé en plein visage de ce cri d'un général rebelle : " MORT A L'INTELLIGENCE ! " .

Antonio Machado a suivi dans sa déroute l'armée

républicaine jusqu'à Collioure où il s'est abattu , où il est enterré , en exil lui aussi .

C'est en exil , un peu avant de s'éteindre , que Juan Ramon Jimenez a reçu le Prix Nobel .

Federico Garcia Lorca a été fusillé par les troupes franquistes , lors de leur entrée à Grenade , sa patrie , tout au début de la guerre civile . + Lire la suiteCommenter

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Jean Cocteau
Jean Cocteau

Les véritables forces de l'esprit, du regard ou du cœur ne deviennent commerciales que si on les livre au public coupées de beaucoup d'eau, de manière à éviter une chute trop violente entre la nouveauté et les habitudes.

Violette Leduc me représente le noyau amer et acide d'une époque où nombre de romanciers triomphent dans un domaine plus accessible et, dirais-je, plus

aimable.

Mais si vous cherchez ce qui singularise les lettres modernes et leur donne leur titre de noblesse, vous le trouverez dans l'oeuvre d'une femme inapte aux concessions et d'une poigne robuste.

Violette Leduc ne fait pas ce qui se fait, mais ce qui se fera. C'est le secret et le martyrologue des vrais artistes.