- N'en parle pas aux enfants, je t'en prie. Ce n'est pas la peine de leur faire du mal, puisque c'est du passé. Je te jure que c'est du passé. Sinon je ne t'en parlerais pas...
Françoisne répondit rien, il fit simplement la seule chose dont il avait besoin à cet instant, garder Juliet contre lui pour que jamais elle ne s'en aille.
Julier mentait. Elle pensait encore à Jérémy.
Le beau fait du bien. Comme s'il renvoyait à la paix. A la douceur. Le beau fait oublier ce poids constant d'une vie décalée du bien-être et de la sécurité, c'est une forme de consolation ; une liberté, un pansement.
J'ai douze ans, ensemble nous pleurons sur les choses vraiment graves de la vie, ces réalités qui ont fait boule de neige sur notre histoire, sur nos jours empilés ; celles qui ne pourront jamais s'arranger et qui font que l'existence, tout à coup, devient essentiellement le passé, rendant le présent infranchissable.
La boucle se bouclait humblement comme cela un jour, bêtement, et c’était tout. C’était la vie, coupée là par la mort, c’était la vie, d’abord par étapes successives puis pour de bon, clôturée par la fin. Une fin discrète, excentrée, dans ce no man’s land justement.
Dans notre famille, il s'agissait de faire bonne figure. Alors peu importait notre tristesse ou notre fragilité : lorsque nous arrivions, comme nous étions chéris notre peine tendait à disparaître instantanément et nous nous lovions naturellement dans un bien-être protecteur et simple, nous nous y fondions, décidés à engranger toutes les marques d'affection. L'anxiété qui nous
taraudait, qui vivait en nous depuis toujours, nous la mettions sous cloche. Nous ne parlions pas : on nous demandait, on nous suppliait du bout des lèvres, sans que cela se voit véritablement, de nous taire et de faire bonne figure.
Un jour à Londres, Le Général m’a dit quelque chose du genre : « ne vous inquiétez pas Gary, vous savez bien que ce sont toujours les meilleurs qui partent ». Ma médiocrité ainsi posée, je ne risquais pas, à l’avenir, d’être fier de mes activités d’aviateur. Sans rire : grâce à mon héros le Général de Gaulle (…) toute fierté m’était désormais interdite
L'histoire de la littérature anglaise, métaphore des égarements du coeur.
Pourtant, à la suite de notre retour en France, nous ne reverrons Agnès qu’une seule fois, puis ce sera fini, comme un livre qui se termine ; lorsqu’il faut refermer la couverture, lisser pensivement le papier cartonné du plat de la main en méditant un peu, et puis voilà. Oublier : classer ce texte, vivre et, du coup, passer à autre chose. Comment retenir les histoires que l’on aime,
sinon en les écrivant.