Nul ne peut par l'accumulation de tous les moyens priver l'autre de l'instruction nécessaire pour son bonheur; l'instruction doit-être commune.
La nature n'ayant donné de propriété à personne.
La propriéte est odieuse dans son principle et meurtrière dans ses effets.
Le vieille danseuse gitane La Malena entendit un jour Brailowsky jouer un fragment de Bach et s'exclama, "Olé! Cela a le duende!", mais Gluck, Brahms ou Darius Milhaud l'ennuyaient. Manuel Torre, qui avait dans le sang plus de culture que quiconque ai-je jamais connu, prononça cette phrase magnifique en écoutant de Falla jouer son Nocturno del Generalife : "Tout ce qui a du son noir a le
duende."
Nietzsche a instruit patiemment sa volonté de puissance par ses longues marches dans la montagne, par sa vie en plein vent sur les sommets. Sur les sommets, il a aimé : « L'âpre divinité de la roche sauvage ». La pensée dans le vent; il a fait de la marche un combat. Mieux, la marche est son combat. C'est elle qui donne le rythme énergétique de Zarathoustra. Zarathoustra ne parle pas
assis, il ne parle pas en se promenant, comme un péripatéticien. Il donne sa doctrine en marchant énergiquement. Il la jette aux quatre vents du ciel.
Gaston Bachelard ressemblait moins à un être humain qu'à un chêne rouvre, magnifique, à l'écorce épaisse comme l'arbre de Zeus, entre la terre des hommes et le monde des dieux, qu'on venait consulter à Dodone, en Épire. Les mouvements de son feuillage dans le vent avaient valeur d'oracle. Un chêne, comme il en pousse aussi dans les plus belles futaies de France et d'Amérique, solide sur
ses pattes jusqu'à ses cinq cents ou même mille ans. Sa barbe blanche, échappée de ses joues et de son menton, lui faisait une guirlande pareille à la mousse espagnole dont se brodent les chênes en Louisiane.
Les mots — je l'imagine souvent — sont de petites maisons, avec cave et grenier. Le sens commun séjourne au rez-de chaussée, toujours prêt au « commerce extérieur », de plain-pied avec autrui, ce passant qui n'est jamais un rêveur. Monter l'escalier dans la maison du mot c'est, de degré en degré, abstraire. Descendre à la cave, c'est rêver, c'est se perdre dans les lointains
couloirs d'une étymologie incertaine, c'est chercher dans les mots des trésors introuvables. Monter et descendre, dans les mots mêmes, c'est la vie du poète. Monter trop haut, descendre trop bas est permis au poète qui joint le terrestre à l'aérien. Seul le philosophe sera-t-il condamné par ses pairs à vivre toujours au rez-de-chaussée?
[Le feu] matérialise la fête des hommes. Aussi haut qu'on puisse remonter, la valeur gastronomique prime la valeur alimentaire et c'est dans la joie et non pas dans la peine que l'homme a trouvé son esprit. La conquête du superflu donne une excitation spirituelle plus grande que la conquête du nécessaire. L'homme est une création du désir, non pas une création du besoin.