Claire-Lise Marguier
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Ils se rendent pas compte à quel point c'est éprouvant d'avoir tous ces sentiments qui bouillonnent, d'être toujours en train de cogiter, de réfléchir, de prévoir des solutions de rechange à tout ce qui passe dans le monde. De comprendre toujours plus vite. Tu finis par te retrouver loin devant, et loin devant c'est pareil que loin derrière, t'es tout seul, avec la différence que loin

devant, les gens sont jaloux et curieux à la fois. Et cruels.

Claire-Lise Marguier
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Ce qu'on a fait le jour de mon anniversaire, ça peut pas se raconter. Les mots il faudrait les inventer parce qu'il en existe pas pour décrire des sensations aussi compliquées, avec des sentiments qui se mélangent tellement que tu sais plus si c'est bon ou si ça fait peur, si tu as honte ou envie, s'il faut s'arrêter ou continuer pour survivre. Parce que c'était ça l'enjeu, on aurait dit,

plus que tout, c'était une question de survie. C'était le faire ou mourir. 

Claire-Lise Marguier
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Il y a le ciel au dessus de moi, mais je ne le vois pas. Moi j'ai toujours vu que ce qui est sombre, ce qui est noir et effrayant, les monstres sous le lit, les fantômes dans le placard, la mort à l'angle de la rue.

Claire-Lise Marguier
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" Tu es sûr que tu veux rien me dire ? il a insisté gentiment. Il avait l'air vraiment inquiet pour moi. J'ai eu l'impression d'une brèche quelque part dans mes poumons, une toute petite brèche de rien du tout mais qui faisait un mal de chien.
J'aurais voulu lui dire que je me sentais comme abîmé.
Que j'existais sans vivre vraiment.
Que des fois j'étais vide et des

fois je bouillonnais à l'intérieur, que j'étais sous pression, prêt à éclater.
Que je ressentais plusieurs choses à la fois, comment dire ?
Que ça grouillait de pensées dans mon cerveau. Qu'il y'avait une sorte d'impatience, comme l'envie de passer à autre chose, quelque chose qui serait bien mieux que maintenant, sans savoir ce qui allait mal ni ce qui serait mieux. Que

j'avais peur de pas y arriver, peur de ne pas pouvoir tenir jusque là. De ne jamais être assez fort pour survivre à ça, et que quand je disais " ça " je ne savais même pas de quoi je parlais. Que j'arrivais pas à gérer tout ce qu'il y'avait dans ma tête. Que j'avais toujours l'impression d'être en danger, un danger permanent, de tous les côtés où je regardais, d'être sur le point de

me noyer.
Comme si j'étais à l'intérieur de moi le niveau montait et que j'aillais être submergé. Mais j'ai pas pu lui dire. J'ai dégluti et j'ai dit ça va aller, merci. C'était plus facile. + Lire la suiteCommenter  J’apprécie          240

Claire-Lise Marguier
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Ecrire c’est pas aussi facile que les maths, c’est pas carré du tout et tu dois choisir les mots les plus adaptés pour faire ressentir les choses aux gens si tu veux qu’ils continuent à tourner les pages.

Claire-Lise Marguier
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Qu'advenait-il de la communauté ? Le bouclier tenait-il le coup ou s'affaissait-il ?Y avait-il d'autres morts ?
Il n'osait affronter la vision qui lui nouait les tripes et l'étranglait. Avait-il quitté Loda alors qu'elle vivait dernières heures ? Il avait voulu agir, mais n'était-ce pas plutôt fuir ? N'avait-il pas endossé ce rôle de faux héros pour échapper à l'ambiance morbide

de la Plaine ?

Claire-Lise Marguier
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A la fin de la récré, quand j'ai ramassé mon sac pour allée en cours avec les filles, il s'est penché en même temps que moi pour prendre le sien, et en se relevant on était si près j'ai pas pu m'en empêcher, j'ai embrassé furtivement ses lèvres, juste pour voir.Il a sourit. Gourmand, il a dit. J'ai eu le cœur tout chaviré de plaisir, va comprendre.

Claire-Lise Marguier
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Il était en train de se rendre compte que s'opposer à la reine signifiait qu'il pouvait perdre pire que sa vie : perdre celle des autres. Et cela pesait plus lourd qu'une enclume sur ses épaules.

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J'avais plus peur. Ni mal. Ni besoin de la lame ou de quoi que ce soit d'autre. Que ça ne s'arrête jamais, je priais dans ma tête.

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Mes parents étaient là. J'ai vu que ma mère avait les yeux rouges, je me suis dit ça y est, il lui a dit. Je me demandais de quelle manière il s'y était pris pour démolir Samy. J'aurais aimé qu'elle me défende. La mère à Samy elle est toujours là pour lui. Je me suis dit que la mère à Samy m'avait plus souvent embrassé ces dernières semaines que ma mère à moi dans toute ma vie.

J'ai regardé ma mère, j'ai cherché son soutien, mais elle a baissé ses yeux. J'ai haussé les épaules pour qu'elle voie que je m'en foutais, je me suis assis sans parler. J'avais l'impression d'une déchirure quelque part. Comme si c'était plus mes parents qui étaient assis là. Des étrangers. Pas des ennemis, juste des gens. Sans lien avec moi. Sans lien de sang. Avant je crois que

j'attendais qu'ils me regardent, qu'ils me parlent, qu'ils s'intéressent. Qu'ils demandent. J'espérais un mot d'eux, comme si pour exister il avait fallu que je passe d'abord par mes parents. Pas ce matin-là. Je crois que j'avais résolu de ne plus faire partie d'eux, de ne plus rien attendre. D'être coupé d'eux. Si ça se trouve ça aurait continué comme ça longtemps, jusqu'à ce que ça

me passe, un jour, peut-être. Je sais pas. Jusqu'à ce que je les retrouve. Personne ne peut le savoir.
Mais ça ne s'est pas passé comme ça. + Lire la suiteCommenter  J’apprécie          100

Claire-Lise Marguier
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Y aura pas de demain, j'ai pensé, pourtant Damien si tu mélanges les lettres ça fait demain. Mais comme on a coupé ça fait Dam, et Dam ça veut plus rien dire.

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Tant que je saigne, je suis vivant.

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"J'ai montré du doigt le calendrier punaisée au mur. Regardez, j'ai dit, j'ai fais une croix rouge à chaque fois que l'un de vous m'a demandé comment j'allais. Juste un "ça va?" ca compais. Un "ça va?", une croix rouge. Simple. Regardez. Ils avaient l'air stupides à essayer de fixer le calendrier sans perdre l'arme de vue. Alors, j'ai demandé, combien de croix rouges? Ils ont pas répondu.

Combien? j'ai hurlé. J'en vois pas, à dit ma mère en pleurant. Je suis désolée, Damien, J'en vois pas. Je voit que des points bleus et des croix noires. Et tu sais ce que c'est que les croix noires? J'ai demandé. Non, elle a dit entre deux sanglots, je sais pas, Dam. C'est chaque fois que vous avez fais un commentaire négatif sur moi. Mes polos, mes piercings, ma coupe de cheveux, ma

silhouaite de fille, mes goûts, ma musique, mes amis. Il y en a presque tous les jours. Tu les vois? Vous les voyez? Ils ont hochés la tête, ils étaient pas fier. Par contre, j'ai dit, il y à un point bleu chaque fois que Samy s'est inquiété pour moi. Chaque fois qu'il m'a dit quelquechose de gentil ou d'agréable. Chaque fois qu'il ma consolé ou embrassé. Vous voyez les points bleus? Ils

ont hoché la tête comme des pantins. Il y en a presque tous les jours des fois plusieurs fois par jour." + Lire la suiteCommenter  J’apprécie          70

Claire-Lise Marguier
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Des fois, j'étais mal à en crever, sans raison, mais j'avais pas envie que ça s'arrête, comment t'expliquer ça ? Si ça s'arrêtait, c'était le vide, et le vide ça me fichait la trouille pire que tout.

Claire-Lise Marguier
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Quant à moi, je me tenais à distance raisonnable des livres, ainsi que je l'avais toujours fait, conscient du danger qu'ils représentent, ne lisant que le strict minimum et ne commettant jamais l'erreur de croire au caractère inoffensif du insignifiant d'entre eux. En lire la première ligne vous asservit jusqu'à la dernière, et même longtemps après. Entre leurs pages, vous n'êtes plus

maître de vous-même ; vous vous abandonnez sans conditions à l'esprit d'une plume plus forte que vous, susceptible de vous emmener dans des travers sombres et glauques, de vous faire admettre des idées fausses sans que vous ne cilliez.

Claire-Lise Marguier
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Moi des fois, je me sentais vide, et d'autres fois trop plein, sans que jamais ça s'équilibre.

Claire-Lise Marguier
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Si c'était possible, on aurait habité dans des chansons.

Claire-Lise Marguier
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J'aurai voulu lui dire que je me sentais comme abîmé. Que j'existais sans vivre vraiment. Que des fois j'étais vide et que des fois je bouillonnais à l'intérieur, que j'étais sous pression, prêt à éclater.

Claire-Lise Marguier
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C'était facile d'être avec lui, mais difficile aussi, comme si c'était dangereux, parce que je n'avais plus de barrières.

Claire-Lise Marguier
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Il m'a dit au lieu d'écrire sur ta peau essaye sur un cahier. Tu peux prendre l'encre que tu veux. C'est toi qui voit. J'ai dit je peux écrire en rouge si je veux, il a dit bien sûr, si tu as envie. Mais j'ai écrit avec du bleu. Je continue. J'ai des pages et des pages, avec plus d'encre que j'aurais jamais eu de sang dans toute ma vie.