Simon Leys
Simon Leys

Des sinologues, dont le savoir obscurcit parfois l'entendement, ont ri des traductions que Pound faisait du chinois classique. Pound, il est vrai, ne savait que peu et mal le chinois, et ses traductions abondent en contresens parfois absurdes. Et pourtant il est significatif de voir que, récemment, d'excellents lettrés chinois sont venus prendre sa défense : en effet, les adaptations de Pound,

philologiquement inacceptables, réussissent souvent à approcher la structure et les rythmes de l'original chinois de beaucoup plus près que les travaux des savants* ... L'idée que Pound s'était formée de la langue chinoise était techniquement fausse, mais c'était une erreur singulièrement intéressante et féconde, car elle était fondée sur une intuition juste. Pound avait correctement

observé que le poème chinois n'était pas articulé autour d'un fil discursif, mais qu'il réussissait à projeter une série discontinue d'images, comparables un peu aux plans successifs d'un film. Là où il se trompa, c'est quand il crut pouvoir attribuer les vertus "imagistes" du langage poétique chinois à la nature prétendument pictographique de son écriture. En fait, même l'étudiant

qui débute a tôt fait de dépouiller cette croyance naïve selon laquelle les caractères chinois seraient autant de "petits dessins" (les pictographes proprement dits représentent à peine un pour cent du lexique chinois) ; mais, chose curieuse, cette notion erronée n'a jamais vraiment quitté l'esprit de Pound, et lui a d'ailleurs dicté quelques-unes de ses interprétations les plus

bizarres et les plus malencontreuses.

*Wai Lim Yip, "Ezra Pound's Cathay", Princeton 1969 ; Y.K. Kao / T.L. Mei, "Syntax, Diction and Imagery in T'ang poetry", Harvard Journal of Asiatic Studies, 1971, vol. 31 ; Stephen W. Durrant, "On Translating Lun yü", in "Chinese Literature : Essays, Articles, Reviews", janvier 1981, vol. 3, n°1. Ce dernier texte rend une éclatante justice aux

traductions de Pound.

ARTS ET LETTRES ; poésie et peinture, aspects de l'esthétique chinoise classique. + Lire la suiteCommenter  J’apprécie          80

Bleuette Diot
Bleuette Diot

Toute une série d'ouvrages extraordinaires sur les thèmes du Mystère, L’historienne mène depuis vingt ans des recherches pluridisciplinaires afin de reconstituer lun passé totalement oublié. Ses études sur les premiers symboles du temple de Göbekli Tepe et des cités pré-agricoles du Croissant fertile sont fascinantes.

La chercheuse a également signé le scénario d’un

film documentaire, réalisé par Jean-Raymond Binet : Le tertre sacré en 2018.

Trilogie « Sumerian Codex », préfacée par Mireille Calmel

Tome 1 : Le sceau du Temple Noir, 2013 ISBN 978-1533387189
Tome 2 : Lapis ex coelis, 2014 ISBN 978-1533418098
Tome 3 : Le disque de Joseph d’Arimathie, mars 2014 ISBN 978-1533448149
Essai : Histoires secrètes

des civilisations -De Göbekli Tepe à Sumer, 2015 ISBN 978 2 35107 138 0
Essai : La genèse de l’humanité – L’émergence de l’homme, 2017 ISBN 978-1974021796
Essai : La genèse de l’humanité – Les dieux civilisateurs, 2018 ISBN 978-1986053242