Christian de Moliner
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Mais comme la première fois, elle dut faire preuve de fermeté et rejeter un grand nombre de ceux qui la contactaient. Elle se demanda comment on pouvait aborder une femme avec un « t’ai chaude série, on béze ? » en espérant une réponse. La pauvreté sexuelle et orthographique de ces hommes était affligeante et elle plaignait leurs amies. Comment se comportaient - ils avec elles ? On ne

pouvait pas fonder une relation sur ce genre de phrase. Mais peut - être se défoulaient - ils sur le chat ? Ils ne devaient trouver personne sur le site avec qui parler. Ils radotaient dans le vide, seuls avec eux - mêmes et avec l’image étrange et déformée qu’ils avaient de la femme.

Christian de Moliner
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Lorsqu’elle ressortit du magasin, par une étrange coïncidence, elle aperçut le dragueur de la plage. Il était seul et ne lui prêta pas attention. Elle faillit courir après lui et l’entraîner dans un café, mais en regardant sa montre elle s’aperçut que le temps lui était compté et que sa famille l’attendait. Elle hésita quelques instants et il finit par quitter son champ de

vision. Elle prit cette disparition pour un signe du destin. Il ne deviendrait pas son premier amant. Elle était persuadée qu’elle se serait donnée à lui s’il avait insisté. Elle se rabattrait sur Thomas et Philippe. Elle se sentait prête pour l’adultère et elle avait pulvérisé une à une toutes les barrières qui protégeaient sa vertu.

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Elle adorait le râle des inconnus qui prenaient leur plaisir. Pourtant, mis à part Daniel, qui se révéla être un expert dans ce domaine, peu étaient capables d’enflammer sa libido par la seule magie des mots. Elle aurait pu se limiter au cardiologue, mais elle aimait changer de partenaire : elle voulait avoir des relations sexuelles virtuelles avec le maximum d’hommes différents. Et

elle refusa souvent de prendre deux fois le même amant téléphonique sauf si elle n’en trouvait pas d’autre.

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Toute notre vie, nous jouons la comédie des apparences. Nos actes sont, trop souvent, induits par des normes prescrites par la morale, l'habitude ou la coutume. Et nous ne cessons de brandir des masques, du berceau jusqu'à la tombe.

Christian de Moliner
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Christian de Moliner
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Il pleuvait sur Saint-Paul sans discontinuer depuis la veille, un temps qui paradoxalement plaisait à Samuel Meiersohn. Il aimait voir tomber les gouttes, en se postant derrière la fenêtre de son appartement ou en marchant bien à l’abri sous sa capuche ; être protégé de l’eau du ciel lui procurait un sentiment de confort, de quiétude et il soupira lorsqu’il entra dans le hall de la

faculté de sciences humaines où il travaillait. Sa récréation était finie et il devrait affronter trois heures ennuyeuses de cours. Il était las d’enseigner, de répéter des phrases déjà dites à maintes reprises, il était fatigué de la monotonie grise de sa vie, de ces jours brumeux qui se succédaient imperturbablement, semblables et ternes, sans que rien ne change ni ne

Bouge. Une étudiante s’approcha de lui et lui tendit
un tract qu’il prit. Il se reprocha de tiquer devant le
voile qu’elle portait. Sa raison lui commandait d’accepter
sans réticences ce hidjab, puisque cette jeune femme se
soumettait sans doute de son plein gré à cette coutume
coranique, mais dans les couches profondes de son moi il résistait à

l’injonction bien-pensante de confondre allégrement progressisme, sens de l’histoire et usages islamiques. » + Lire la suiteCommenter  J’apprécie          00